Mobilité, viser un autre horizon
Elargir des autoroutes a-t-il encore du sens? Les débats autour de la voiture sont souvent menés avec les tripes et la campagne de votation autour des 5 milliards pour l’extension de six tronçons d’autoroute ne fait pas exception. Encore aujourd’hui, la voiture a une forte valeur symbolique de liberté. Et pour celles et ceux qui habitent loin des centres urbains, elle n’est souvent pas un choix. La voiture est utile aussi aux travailleur·euses qui ont des horaires de travail irréguliers, souvent dans des métiers précaires. La votation du 24 novembre ne doit pas se transformer en un procès facile contre les automobilistes.
Reste que développer des autoroutes est un contresens. Le Conseil fédéral semble avoir oublié son engagement pour un bilan en matière d‘émission de CO2 neutre en 2050. Investir aujourd’hui dans les autoroutes, c’est fermer les yeux sur la nécessité de changer de modèle de société pour s’en sortir. Les catastrophes climatiques qui sèment la mort sont une réalité en Suisse aussi. Cet été, au moins douze personnes sont mortes ensevelies sous des laves torrentielles dans les Alpes. Les canicules causent chaque année des décès prématurés. La pollution est la cause de maladies cardiovasculaires et pulmonaires qui affectent les plus vulnérables. Et l’électrification totale du parc automobile n’est pas encore d’actualité, sans compter qu’elle ne règle pas le problème mais externalise les émissions de CO2, avec la production polluante de batteries. Agrandir des autoroutes, c’est aussi augmenter l’offre et rendre le déplacement sur la route d’autant plus attrayant… jusqu’à ce que le réseau soit à nouveau saturé.
Se déplacer loin et rapidement est devenu un mode de vie. Celui-ci est-il encore désirable? La population parcourt en moyenne 30 km par jour, la majorité en voiture et de plus en plus pour les loisirs. L’accès aux transports publics et très inégal selon le lieu d’habitation et cher pour les personnes qui doivent assumer en plus le coût d’une voiture. Il est absolument nécessaire de prendre à bras-le-corps cette problématique en développant le réseau et en faisant moins reposer le coût des transports collectifs sur les individus.
La question de la mobilité doit aussi passer par un aménagement du territoire à taille humaine, avec des services, des emplois et des lieux de détente à proximité. Le monde du travail devra aussi s’adapter à une société écologiquement soutenable, qui n’oblige pas les travailleur·euses à se retrouver dans des embouteillages ou des trains bondés aux heures de pointe.