Un terrorisme indicible
J’ai approché l’âge adulte en ayant progressivement pris conscience des horreurs de la Shoah, de l’apartheid de l’Afrique du Sud, du colonialisme et de la naissance du post-colonialisme, de l’ingérence scandaleuse des USA en Amérique latine, des méfaits des guerres, dont celle du Vietnam. Tout en pensant que, malgré ses défauts, ma patrie avait quelque chose de rassurant dans sa neutralité.
En 1996, il y a vingt-huit ans, la Commission Bergier (suisse) a initié un travail de cinq ans qui a mis en évidence le rôle indigne de la Suisse à propos des fonds juifs en déshérence. Les mille pages des résultats de la Commission Bergier ont finalement été pour moi une révélation cauchemardesque, une sorte de tsunami: comment est-il possible de s’abaisser à profiter à ce point de la détresse humaine? Qui sommes-nous? Comment avons-nous pu accepter passivement l’action odieuse d’un tel gouvernement?
Et bien, je pense que nous en sommes toujours là, il n’y a que l’interlocuteur qui a changé, la victime transformée en bourreau. Le gouvernement, lui, et le parlement dans son ensemble, se gargarise en se posant la question: faut-il désigner le Hezbollah comme groupe terroriste, ainsi que le Hamas, tout en restant passif devant un gouvernement et un premier ministre israéliens qui, après l’horreur du 7 octobre, font preuve d’un terrorisme indicible. À Gaza et actuellement aussi au Liban. Au point de refuser aux civils palestiniens cette aide indispensable de l’UNRWA, aide rétablie par l’ensemble de la communauté internationale.
Un jour, je l’espère, une nouvelle commission nous jugera.
Giuliana Canonica,
Cologny (GE)