Édito

Gaza, si loin de Genève

Gaza, si loin de Genève
Samedi 10 août, l'armée israélienne a envoyé trois missiles sur une école de Gaza servant de refuge à 250 civil·es. Bilan: 93 mort·es, dont onze enfants, et des centaines de blessé·es. KEYSTONE / image extraite d'une vidéo
Israël-Palestine 

Le gouvernement Netanyahou a marqué le coup à sa manière. Deux jours avant la commémoration du 75e anniversaire des Conventions de Genève, son armée a envoyé trois missiles sur une école de Gaza servant de refuge à 250 civil·es. Bilan: 93 mort·es, dont onze enfants, et des centaines de blessé·es.

Entre le 7 octobre et début juillet, les raids de Tsahal ont visé 477 établissements scolaires et 107 hôpitaux. En ciblant systématiquement les infrastructures civiles, «Israël a ainsi radicalement modifié l’équilibre établi par le droit international humanitaire (DIH) entre la protection des civils et la nécessité militaire», dénonçait Francesca Albanese, la rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés pour les Nations unies, dans un rapport publié le 25 mars.

Depuis, rien n’a changé. L’Etat sioniste continue à bafouer les textes adoptés en 1949 afin de protéger les civil·es et les personnes vulnérables lors de conflits armés. Une entreprise de destruction menée, tragique paradoxe, avec le soutien des principaux Etats (occidentaux) qui ont contribué à mettre sur pied ces garde-fous après la Seconde Guerre mondiale. Quant à la Suisse, dépositaire des Conventions de Genève, elle suit honteusement le mouvement. «Il est difficile de concilier le droit humanitaire et le droit d’Israël à se défendre», osait affirmer, en novembre, le conseiller fédéral (PLR) Ignacio Cassis, fidèle allié de Benjamin Netanyahou, remettant en cause l’applicabilité des traités internationaux.

Cette régression a des conséquences terribles pour le peuple palestinien, abandonné à son colonisateur et bourreau. Il marque aussi l’entrée dans une ère nouvelle, lourde de menaces pour les populations civiles sur l’ensemble du globe: «Les conflits armés contemporains et les règles du droit international humanitaire qui les régissent risquent de devenir un espace moral et éthique alternatif, dans lequel les pays considèrent pouvoir en toute liberté user de la force militaire sans retenue», craint Cordula Droege, cheffe de la direction juridique du CICR1>«Des tactiques militaires ‘brutales mais légales’ fragilisent les Conventions de Genève», Le Temps, 10 août 2024 ..

«Personne dans cette grande salle de justice ne se fait d’illusions sur le droit international, mais c’est ce que nous avons»2>«Nous sommes très loin de la reconnaissance de génocide», Mediapart, 10 août 2024., affirmait Philippe Sands, l’avocat de la Palestine devant la Cour internationale de justice (CIJ). Méprisé, souvent inappliqué, le DIH doit ainsi être défendu. C’est en effet en s’appuyant sur ce corpus juridique que la CIJ et la Cour pénale internationale ont porté les attaques les plus puissantes contre l’impunité dont jouit Israël.

Face au cynisme des Etats, inscrire ces décisions juridiques dans la réalité exigera certes une mobilisation gigantesque de la population civile. Mais c’est la seule voie qui permettra de mettre la barbarie en échec.

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Opinions Édito Guy Zurkinden Israël-Palestine  Gaza

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