Édito

Le berger des mers aux arrêts

Le berger des mers aux arrêts
C'est notamment à Paul Watson que l’on doit le moratoire de 1986 sur la chasse commerciale à la baleine.
Activisme

Celui qui a été surnommé le «pirate» a été mis sous les verrous. Paul Watson a pourtant pourchassé toute sa vie les vrais pirates, ceux qui massacrent illégalement les grands cétacés. A 73 ans, il a été arrêté par le Danemark et risque d’être extradé vers le Japon, où il risquerait sa vie selon les défenseurs·euses de l’environnement. C’est à cet infatigable militant et d’innombrables autres, qui ont notamment œuvré au sein de Greenpeace, que l’on doit le moratoire de 1986 sur la chasse commerciale à la baleine. Une décision qui a littéralement sauvé ces grands mammifères marins de la disparition. Au XXe siècle, près de trois millions de baleines ont été décimées.

Son arrestation, que l’on espère très temporaire, aura sans doute le mérite de placer à nouveau la question toujours brûlante de la préservation de la vie dans les océans au cœur des préoccupations. La pêche légale et illégale continue à vider les mers de leurs poissons et de leurs cétacés, alors que l’humanité et les autres espèces dépendent de leurs écosystèmes pour vivre et respirer.

L’ONG Sea Shepherd [«berger des mers» en français], fondée et présidée par Paul Watson, continue à naviguer sans relâche pour stopper les braconniers. A l’heure où d’autres menaces se conjuguent pour détruire les écosystèmes marins – déchets plastiques, pollutions, réchauffement climatique, etc – son action est plus que jamais nécessaire. Avec un micro budget – quelque 20 millions de dollars – et des milliers de bénévoles courageux, l’organisation montre au monde entier que les océans ne sont pas condamnés à être les zones de non-droit qu’ils sont de facto, faute de mise en œuvre des lois.

Sea Shepherd se substitue à son échelle à une police des mers presque inexistante. Aujourd’hui, certains Etats africains, et l’Equateur, pour les îles Galapagos, font appel à ses services pour surveiller leurs eaux territoriales et dissuader les prédateurs humains. Mais c’est à une toute autre échelle que les Etats devraient agir.

Si les méthodes musclées de Paul Watson et de Sea Shepherd sont contestées, allant jusqu’à couler des baleiniers dédiés à la pêche illégale, sa cause ne l’est pas. A l’heure où la vie sur la planète est gravement menacée, le militant a le mérite de nous interroger avec son concept oxymorique de «non-violence agressive», qui consiste à s’opposer physiquement et sans violence aux braconniers, tout en n’hésitant pas à saboter les biens utilisés pour faire le mal. En l’occurrence les navires utilisés pour tuer illégalement des mammifères marins. Une philosophie qui l’avait fait exclure de Greenpeace en 1977. Espérons qu’elle ne lui vaille pas de finir ses jours derrière des barreaux.

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