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Des traumatismes physiques et psychiques

Deux ans après le déclenchement de l’invasion russe en Ukraine, le lourd tribut payé par la population se poursuit, alerte Médecins sans frontières Suisse.
Ukraine

Les combats sur les lignes du front russo-ukrainien restent dévastateurs alors que le 24 février vient de marquer les deux ans de l’escalade de la guerre en Ukraine. De 2014 à 2022, plus de 14’000 personnes avaient été tuées. Depuis février 2022, ce nombre s’est multiplié avec des centaines de milliers de personnes blessées physiquement et psychologiquement, et près de 10 millions déplacé·es.

«Il y a environ six mois, tout a été bombardé: le centre médical, la pharmacie, et toute l’infrastructure a été détruite… mais ce n’était pas la fin.» Agée de 75 ans, Liudmyla Karatsiuba vit à proximité de Kupiansk, une ville quasiment sur la ligne de front, dans le nord-est de l’Ukraine, où les combats et les bombardements n’ont laissé aucun bâtiment public dans un état suffisant pour y installer une clinique. «Ma maison tenait encore debout. Je l’ai proposée à Médecins sans frontières (MSF) qui cherchait un lieu pour abriter les consultations médicales et psychologiques pour toute la communauté. Je m’efforce à appliquer les conseils des psychologues de MSF et je montre à mes voisins les exercices de respiration à la bougie, utiles pour retrouver un peu de calme et de sérénité. Cela m’a permis de me rendre compte que je pouvais encore être utile à mon âge.»

Liudmyla n’est pas un cas isolé près de la ligne de front. Depuis l’escalade dramatique de la guerre en février 2022, des cliniques mobiles médicalisées sillonnent les régions alentour. La plupart des personnes que le personnel médical rencontre sont des femmes de plus de 60 ans, souffrant de maladies chroniques comme l’hypertension et le diabète. Alors que certaines ont été évacuées, d’autres n’ont pas pu partir ou ont choisi de rester dans leurs communautés.

Olena Beda et ses deux enfants vivent depuis plus d’un an dans un abri pour personnes déplacées dans la région de Kirovohrad, au centre de pays, après avoir fui la région de Donestk. Bien qu’ils soient relativement éloignés des lignes de front, les drones et les missiles rythment leur quotidien depuis deux ans. «Vania, mon fils cadet, a besoin d’un suivi médical régulier. Il a commencé à avoir des problèmes de sommeil après les premiers bombardements. Un soutien psychologique des équipes de MSF, notamment au travers de sessions présentées sous forme de jeu, nous a permis d’atténuer son anxiété, qui s’exprimait par des moments de panique et de frayeur. Par la suite, il a pu retourner à l’école et même se faire de nouveaux amis. Mais le moindre bruit ou la moindre conversation sur la guerre peuvent engendrer un changement d’humeur soudaine.»

Le 18 avril 2023, Tetiana a perdu sa jambe alors qu’elle se trouvait au marché d’Ukrainsk, dans la région de Donetsk, où elle travaillait comme vendeuse. «Le marché a été frappé par des missiles, et j’ai été gravement blessée. J’ai par la suite été évacuée vers l’ouest ukrainien par le train médicalisé de MSF. Pendant mon transfert, je me sentais perdue. Je ne savais pas comment j’allais faire face à une amputation. Aujourd’hui, je vis à Kyiv avec mon fils et, à 72 ans, je suis heureuse d’avoir survécu.»

Depuis, les ambulances ont remplacé le train, en circulation entre mars 2022 et décembre 2023. En raison d’un changement dans la dynamique de la guerre, les patient·es restent désormais dans l’est du pays et 15 ambulances se chargent de référer les personnes blessées par les bombardements ou malades chroniquement vers des établissements médicaux plus éloignés du front.

Nadia Voloboieva est chargée de communication pour MSF en Ukraine, www.msf.ch

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