Édito

PAV ou prédation foncière?

PAV ou prédation foncière?
On est véritablement face à une opération de prédation. KEYSTONE
Votation cantonale genevoise

N’en jetez plus, notre boîte aux lettres est pleine. Les milieux immobiliers et les partis de droite majoritaires au parlement genevois mènent une campagne d’enfer dans le cadre de la votation du 3 mars pour faire adopter deux projets de loi visant à accroître de manière substantielle les logements en propriété privée dans le périmètre Praille-Acacias-Vernets (PAV). Ceci en obligeant l’Etat à céder une partie des terrains dont il a la maîtrise, soit 80% du périmètre. Cela obéit sans doute à un double but: il y a de gros bénéfices en perspective et ces projets de loi s’inscrivent dans une politique visant à favoriser les prébendes de quelques-un·es – les client·es du bloc bourgeois – au détriment du bien commun.

Politiquement, la démarche est déjà outrancière. Les tenants de ce projet s’assoient sur un vote populaire récent. En 2018, 61% du Souverain genevois acceptait une loi fixant à 12% la part dévolue à la propriété par étages. Las, fort de sa majorité automatique, la droite est revenue à la charge et entend porter ce taux à 24% (et même 51%, si l’on prend en compte les terrains qui sont d’ores et déjà en mains privées).

L’argument invoqué – aider la classe moyenne – est superfétatoire. En l’occurrence, la part ripée du locatif vers la PPE est précisément celle dévolue au loyer libre. Paradoxalement, les deux lois en question proposées au peuple vont à effet contraire en privant la classe moyenne de logements à sa portée et en poussant la propriété privée. On sait que cette dernière est d’un accès compliqué – il faut une épargne considérable – et obéit à des règles de l’entre-soi (mieux vaut être copain comme cochon avec le promoteur si on veut espérer décrocher un tel logement en PPE).

Le terrain est rare à Genève. Le logement aussi. Brader un tel périmètre en mains publiques pour le profit de quelques-un·es – les logements pourront être revendu dix ans après leur acquisition sans contrôle sur les prix – est la négation d’une politique sociale. La priorité est au logement pour toutes et tous.

Pire, il s’agit d’un acte indécent. On est véritablement face à une opération de prédation. Plutôt que d’œuvrer pour le bien commun, la majorité parlementaire se livre à une politique clientéliste – celle des petits copains – sans même rougir.

Il est urgent de mettre une fin à cette politique désinhibée. Au-delà du strict cas du PAV – illustration d’un capitalisme foncier certes moins visible que celui de la finance mais qui réserve des profits tout aussi juteux –, c’est aussi un stop qui doit être mis à la politique casino sans frein des partis bourgeois. Ceux-ci obéissent à un seul moto: tant que je gagne, je joue. Il appartient au peuple d’y mettre le holà.

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