«Notre système n’est plus tenable!»
Et voilà… Comme chaque fin d’année, les primes maladie prennent l’ascenseur, cette fois de manière particulièrement brutale. Nos autorités cantonales et fédérales jouent, encore et toujours, les surpris (de moins en moins) et les indignés (de plus en plus) pour faire bonne figure. Au lendemain de l’annonce de la hausse des primes pour 2024, on assiste à une foison de propositions et de solutions venant de tous les partis et les milieux concernés. Après tant d’années de non-action, verrons-nous enfin nos politiques prendre les décisions qui s’imposent?
Certes, les coûts de la santé sont, en soi, un problème. Mais, à force d’en parler, cela devient l’arbre qui cache la jungle de notre système de caisses maladie qui, de par son opacité, ses multiples catégories d’assurance (obligatoire et complémentaires), sa pléthore de comparateurs peu fiables, etc., devient impossible à gérer pour les assuré·es et impossible à contrôler pour nos gouvernements. Mises à part les différentes initiatives ayant pour but de réformer le système et qui ont, à ce jour, toutes échoué, le seul remède proposé a été d’inciter les assuré·es à changer de caisse chaque année, comme si notre assurance était une banale marchandise qu’on achète dans un magasin ou un autre selon les prix du marché.
Cela dénote un esprit crasse de mercantilisation de la santé publique. On traite les citoyen·nes que nous sommes (et donc les patient·es potentiel·les) comme de stupides marionnettes et de grosses vaches à lait. Le système actuel de caisses maladie introduit de la concurrence dans un domaine, la santé, qui devrait en être exempt. Par cette pratique, les caisses maladie font reposer les coûts sur la population, alors qu’elles font fructifier les bénéfices de leurs organes dirigeants.
Résultats? Les assuré·es de condition modeste doivent, malgré les subsides, réduire certains postes essentiels de leur budget (alimentation, loisirs, soins dentaires…) et, ce qui est le plus aberrant, renoncer à se faire soigner afin de pouvoir payer leurs primes de caisse maladie. Une personne ayant témoigné dans la presse a même dû quitter son logement pour retourner vivre chez ses parents! Cela s’explique en grande partie par le fait que les salaires n’augmentent pas en fonction des hausses de primes d’assurance, et aussi par le fait que les primes maladies ne sont pas prises en compte dans le calcul du «panier de la ménagère».
Ce mépris des citoyen·nes de la part d’une majorité de nos élu·es, qu’ils soient cantonaux ou fédéraux, fait froid dans le dos et nous incite à crier notre exaspération et à penser qu’un collectif d’assuré·es, indépendant de tout parti politique, pourra enfin d’une façon ou d’une autre contribuer à changer les choses. C’est ce qui nous amène à nous faire connaître publiquement, et au-delà de nos frontières cantonales.
Ce collectif regroupe actuellement une quarantaine de personnes de différentes professions et de diverses sensibilités. Son objectif principal est de faire pression auprès de nos autorités pour la mise sur pied d’une véritable assurance santé reposant sur les principes suivants: elle est unique, entièrement publique ou alors construite sur le système de l’AVS; elle est totalement dissociée des assurances complémentaires; les primes sont fixées en fonction du revenu et ne doivent pas excéder 10% du revenu disponible; les surplus sont couverts par les cantons et la Confédération; elle porte un accent particulier sur la sensibilisation à la santé publique en général et sur la prévention des maladies en particulier.
Tout au long de l’année 2024, plusieurs actions concrètes sont prévues comme, entre autres, une manifestation publique, le lancement d’une pétition et l’interpellation de nos élu·es au sein d’un débat public.
Denis Cattin est membre du collectif citoyen «Pour une véritable assurance santé».
*Lire notre édition du 20 novembre 2023