Un parc immobilier vétuste
Le parc immobilier genevois représente 50% de la consommation énergétique du canton. Les 60% de ce parc dépassent actuellement les seuils fixés par la loi, et 90% des bâtiments sont alimentés par des énergies fossiles. Il est depuis longtemps l’un des plus vétustes de Suisse, avec un taux de rénovation inférieur à 1% par an.
Durant les dernières années, les taux hypothécaires bas et la facilité d’emprunt ont augmenté la valeur des biens à la revente, sans aucune vision de revalorisation par la rénovation et sans se préoccuper des conséquences liées à une éventuelle remontée des taux. Une vraie gestion immobilière responsable, avec la nécessité d’enfin entreprendre de manière massive la rénovation énergétique nécessaire du patrimoine bâti genevois, est passée à la trappe.
Cette période faste pour l’économie aurait dû permettre de rattraper ce retard. Alors que des acteurs publics, comme les Fondations immobilières de droit public, ont accéléré l’assainissement de leur parc immobilier de logements bon marché (HBM), sans hausses conséquentes pour les locataires, cela n’a pas été le cas dans une grande partie de l’immobilier genevois.
A la veille des élections fédérales, force est de constater que l’ensemble des partis politiques ont compris que les enjeux climatiques étaient un des sujets brûlants du moment. On se demande dans ce contexte quelle puce a bien pu piquer la majorité de droite du Grand Conseil qui a donné un délai supplémentaire aux propriétaires pour se mettre en conformité. C’est un débat biaisé qui nous a été proposé, avec l’idée que tous les propriétaires allaient faire régulièrement un certificat énergétique de leur bien mesurant une performance énergétique théorique, au lieu d’utiliser un indicateur simple, représentatif des performances réelles, accessible rapidement et sans frais, qui est l’indice de dépense de chaleur. Pourquoi remettre en doute un système bien rôdé? N’a-t-on pas voté l’urgence climatique? N’a-t-on pas un plan directeur de l’énergie 2030? N’a-t-on pas compris avec les chaleurs ressenties cet été qu’on devait réagir, et vite?
Cette proposition ne profite à personne. Ni aux locataires qui doivent payer des charges de plus en plus élevées et qui vivent pour la plupart dans des immeubles non rénovés avec des loyers en constante hausse. Ni aux propriétaires, car, en repoussant sans cesse des travaux pourtant nécessaires, ils dévalorisent leurs biens.
Cette fuite en avant est triste pour notre planète et notre canton. Jadis la Suisse était un modèle d’innovation, alors que maintenant l’immobilier est devenu une simple caisse enregistreuse trop vétuste. Nos député·es nous ont servi un bien mauvais plat.
Didier Prod’Hom,
conseiller municipal à Carouge et vice-président de la Fondation HBM Emma Kammacher