Édito

Rien n’est écrit, tout est à construire

Rien n’est écrit, tout est à construire
Défilé du 1er mai à Genève en 2019. KEYSTONE
1er Mai

Le 1er mai, c’est lundi. La fête des travailleuses et des travailleurs est bien sûr l’occasion de profiter d’un moment d’échange et de convivialité. De se retrouver, de se compter aussi. Ce qui n’est pas de trop dans une société de plus en plus anémiée et individualiste. Mais cela doit aussi être l’occasion d’offrir des perspectives au peuple de gauche.

Car ce dernier n’est pas à la fête. Ses droits sont attaqués et les défaites malheureusement plus fréquentes que les victoires. Les actionnaires des entreprises suisses ont perçu l’an passé 44 milliards de francs de dividendes; les salaires, eux, sont à la peine. Quand ils ne baissent pas. 2022 a ainsi enregistré un recul des salaires réels évalué à 1,9% par les syndicats! En clair, les petits revenus, les temps partiels – qui concernent particulièrement les femmes – sont priés de payer la facture des années Covid. Les grandes fortunes, elles, prospèrent.

Et quand il s’agit de rééquilibrer – un peu – la balance, les chiens de garde des intérêts de ces nantis montrent les crocs. Les syndicats ont réussi à faire passer des salaires minimaux dans certains cantons un peu plus progressistes; qu’à cela ne tienne, une droite aux ordres au parlement fédéral vote la motion Ettlin pour tenter de liquider cette protection.

Mercredi, le nouveau conseiller fédéral udéciste Albert Rösti a lancé une nouvelle offensive contre le service public audiovisuel. Nonobstant le fait que le peuple a voté contre une telle mesure en 2018. Cela démontre une belle constance. Celle d’une droite décomplexée, qui se fixe des objectifs et se donne les moyens de les atteindre pour démanteler le rôle social et régulateur de l’Etat. Une fois tel ou tel pan du secteur public privatisé, impossible de revenir en arrière, selon la mécanique dite «du cliquet».

Un volontarisme dont la gauche pourrait s’inspirer. Revenir à la charge autant de fois qu’il le faudra, ne pas mollir, proposer des mesures concrètes qui parlent aux travailleuses et aux travailleurs, contourner par voie d’initiative des institutions par trop inféodées aux pouvoirs de l’argent. Ne rien lâcher sur les retraites de nouveau sous attaque à Berne. Ou sur l’égalité salariale hommes-femmes, comme le rappellera la Grève féministe le 14 juin.

Rien n’est écrit, l’émergence des mouvements sociaux est souvent imprévisible et leurs effets peuvent se déployer sur le long terme. Il convient de ne pas l’oublier. Les première défaites sont d’abord celles qu’on s’inflige à soi-même.

Opinions Édito Philippe Bach 1er Mai

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