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Candidat au Grand Conseil sur la liste Ensemble à gauche, Lucien Durand alerte sur la progression de la précarité à Genève et les entraves à la prise en charge du sans-abrisme.
Précarité

Un phénomène croissant sévit: la grande précarité augmente. Nous ne la percevons que par petites touches: un mendiant à Bel-Air, une personne dormant à la rue de Lausanne par une nuit glaciale ou encore une autre avec une pancarte «j’ai faim» sur le pont du Mont-Blanc.

Les manifestations de la grande pauvreté ne constituent que la partie émergée de l’iceberg de la misère. Elle reste le plus souvent ignorée par la population et les autorités.

Des centaines de personnes se rendent quotidiennement dans des structures d’accueil de jour et de nuit pour un repas, une aide administrative, une coupe de cheveux ou simplement un endroit pour se reposer loin de la rue. Malheureusement, les capacités sont limitées, beaucoup n’obtiennent pas l’aide nécessaire ou dorment dehors, dans des parcs, sous les ponts, dans des caves ou dans des toilettes publiques. Ces personnes sont invisibilisées et n’ont pas le droit à la parole et encore moins à l’écoute. En tant que travailleurs et travailleuses sociaux·ales, nous voulons relayer leur voix. Nous sommes confronté·es à des barrières institutionnelles et administratives très difficiles à franchir. Les places d’hébergement d’urgence sont sous-évaluées et les lieux d’accueil constamment saturés. Nous estimons a minima que plus de 1000 personnes vivent en situation de sans-abrisme à Genève et seulement 500 places «d’urgence» sont proposées par les différentes institutions et associations.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette situation:

L’accessibilité au logement est ardue. Il n’y en a pas assez et les prix sont exorbitants. Le droit au logement est un droit constitutionnel qui se trouve en compétition avec le droit – et le pouvoir – des propriétaires et des régies à faire du profit, la crise du Covid a mis sur le carreau des personnes déjà précaire, l’augmentation générale des prix. La situation migratoire actuelle ne va pas s’arrêter. C’est même le contraire qui s’annonce, en raison des changements climatiques qui mettront des millions de personnes sur les routes de l’exil. Nous devons être en mesure d’accueillir dignement celles et ceux qui fuient leur pays pour des raisons climatiques, économiques ou sociales. Ce que nous avons fait pour les Ukrainien.nes, nous avons la responsabilité de le faire pour tous·tes les migrant·es. Nous avons le devoir de changer les lois qui les empêchent de prétendre à un travail, à un logement et à une situation humainement acceptable.

Genève est une des villes les plus riches du monde dans l’un des pays les plus riches du monde. Nous y accueillons avec un tapis rouge les plus grandes fortunes et les sièges des plus grandes multinationales. Des transactions financières se chiffrant en milliards se font tous les jours ici, au cœur de la Genève internationale. L’argent qui en découle doit servir à accueillir dignement les personnes présentes sur notre territoire et non pas à permettre à une classe hyper-minoritaire de continuer à capter les richesses des pays dont sont souvent issues les personnes qui viennent chercher un abri à Genève.

Diverses entraves s’opposent à l’adéquation de la prise en charge du sans-abrisme: les moyens ne sont pas dirigés au bon endroit, l’attentisme, le manque de transparence des autorités gestionnaires (l’Etat, la Ville, les communes), le racisme institutionnel qui prétend que seules certaines catégories «méritent» de l’aide, le manque de moyens pour les structures et associations au niveau social et sanitaire, la priorité donnée au capital ainsi que le mépris de classe de la part des dirigeant·es politiques et économiques.

Lucien Durand est travailleur social et candidat au Grand Conseil (Liste 6 Ensemble à Gauche: solidaritéS, DAL, Parti du Travail)

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