Édito

Déferlante de fake news

Déferlante de fake news
Keystone
Désinformation

Le consortium d’investigation «Forbidden Stories» 1> Dont font partie 30 médias, parmi lesquels la RTS et le groupe Tamedia. , Histoires interdites en français, a révélé la semaine dernière ce qu’aurait pu être l’aboutissement du travail de la journaliste indienne Gauri Lankesh sur la désinformation, si elle n’avait pas été assassinée en septembre 2017. A la clé, d’importantes révélations sur une véritable industrie de la fake news, apte à influencer des élections ou à propager de fausses informations en vendant au plus offrant ses services informatiques. La technique à base de cyber-espionnage et de manœuvres sur les réseaux sociaux avait déjà fait parler d’elle alors qu’il était question d’ingérence russe dans les élections américaines. Mais le mal est loin de s’y limiter. L’enquête révèle le palmarès à faire froid dans le dos d’une entreprise israélienne spécialisée dans l’intox.

En quelques clics, le montage prend corps: des faux comptes créés sur les réseaux, qui peuvent être coordonnés pour répandre comme une traînée de poudre une information choisie – aussi erronée soit-elle. L’opération devient d’autant plus facile à l’heure de l’intelligence artificielle: quelques clics encore et des robots conversationnels comme ChatGPT peuvent décliner des centaines de milliers de fausses informations. Tout cela vaut des millions, que n’hésitent pas à débourser certaines personnalités politiques. L’enquête montre qu’une trentaine de pays, essentiellement sur le continent africain, auraient vu leurs élections ainsi influencées.

La Suisse n’est pas épargnée non plus. L’une de ses banques – dont l’identité est inconnue – apparaît dans un assemblage créé de toutes pièces pour nuire à la réputation d’un ministre d’un pays asiatique. Mais la menace la plus prégnante plane sur les réseaux sociaux: la Suisse figure dans la liste des Etats où le groupuscule israélien génère des faux profils.

C’est dans ce contexte explosif que la Cour suprême des Etats-Unis se penchera cette semaine sur la question de l’immunité des protagonistes du web. S’il est si simple de produire de la désinformation en masse, les plateformes jouent un rôle de relais indéniable dans cette mécanique criminelle. Elles sont pour l’heure protégées par la législation américaine, qui empêche de les poursuivre pour les contenus publiés par leurs utilisateurs et utilisatrices. Il y a fort à parier pourtant que si elles devaient être mises face à leurs responsabilités, leur velléité à trier le vrai du faux s’en trouverait démultipliée. A moins que leur refus ne cache mal leur impuissance face au monstre dont elles ont accouché?

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