On nous écrit

Doutes

Léon Meynet se demande si le progrès est incompatible avec la sauvegarde de la planète.
Climat

Si je poste cette question aujourd’hui, c’est parce qu’il y a mille et une raison d’en douter à l’heure de tous les excès de destruction par les guerres; par le jusqu’au-boutisme des exploitations des énergies carbonée off shore et par fracturation hydraulique; par la course infernale à l’exploitation des métaux rares dans des conditions de destruction irresponsable des terres et de grande précarité pour le tiers monde; par la déforestation systématique de la forêt amazonienne à des fins de développement de cultures céréalières sans limite pour produire des biocarburants ou de l’huile de palme en Indonésie; par le recours massif du tout à l’électricité qui donne un aura d’énergie propre aux filières nucléaires, car non émettrice de CO2, alors qu’aucune solution viable n’a été trouvée à ce jour pour éliminer son combustible périmé irradié ad æternam en évitant d’en rappeler sa dangerosité; par la multiplication des sites pétrochimiques sur tous les continents destinés à produire plus et à transformer de manière optimale les dérivés du pétrole dont les cancérigènes polypropylènes.

Pour poursuivre avec mes doutes: par la bétonisation à outrance des terres arables pour créer des infrastructures sportives ou de loisirs gigantesques quand ce ne sont pas de nouvelles routes, autoroutes, voies de chemin de fer à grande vitesse, de nouveaux lotissements hauts et bas de gamme; par la multiplication de nouvelles voies terrestres et maritimes (la nouvelle route de la Soie, la voie maritime du pôle Nord). Et tout ça avec une énergie carbonée folle qui ne fait qu’accélérer le réchauffement climatique donc la déglaciation tous azimuts des pôles et des montagnes et rend inéluctable la montée des mers et des océans.

Jamais à ce train-là nous serons en mesure de contenir le réchauffement climatique à 1.5 degré qu’il soit à l’horizon de 2030 ou de 2050. Comme ce fut le cas cette année, nous nous acheminons inexorablement vers la sécheresse (jamais les cours d’eau n’ont été si bas), les canicules, les violentes intempéries, les multiplication des catastrophes naturelles des feux de forêts aux subites inondations, de la prolifération des particules fines potentiellement cancérigènes et des virus issus ou non du dégèlement du permafrost, de la disparition en cascade des insectes et autres espèces animales qui déséquilibre irréparablement la chaîne alimentaire de vie.

Alors oui, nos autorités politiques auront leur responsabilité, comme elle a été engagée de manière irréfléchie et absurde pour lutter contre la pandémie du Covid-19, quant à la manière d’instruire, de préparer, de diriger leurs citoyen·nes vers cet avenir proche d’une fin irrémédiable des ressources et de la vie sur notre planète.

Ne nous laissons pas abuser impunément plus longtemps. Nous sommes concernés au premier chef. Le changement nous appartient. Rejoignons sans tarder ces communautés, ces associations qui sont proactives dans l’orientation de nouveaux comportements de consommateurs, de voyageurs. Changeons nos modes de mobilité. Réapprenons à marcher entre les arrêts de bus, de tram au lieu de les attendre. Réutilisons encore plus massivement nos vélos, nos trottinettes, nos rollers en toute circonstance. Evitons les voyages au long cours pour satisfaire nos envies d’exotisme. Apprenons à vivre dans la proximité de toute chose y compris de nos loisirs sportifs ou culturels.

Sortons nos têtes de nos smartphones, tablettes, de nos ordinateurs et de tous nos écrans qui ne sont que suggestion et entretien d’une fuite en avant sans fin: apprenons à reconstruire notre libre arbitre. Sortons de notre bulle individualiste et narcissique pour rejoindre un collectif. Militons dans les groupes structurés d’opposition au développement aveugle et criminel de l’environnement. Luttons contre l’immédiateté en apprenant la valeur du temps long. Ce n’est qu’ensemble et à ces conditions que nous aurons la perspective de voir arriver un changement. Les gestes barrière de la survie existent, mettons-les dans la lumière de l’actualité.

Léon Meynet, Chêne-Bougeries (GE)

Opinions On nous écrit Votre lettre Climat

Connexion