Suisse

Extrême droite: les limites de la loi

Extrême droite: les limites de la loi
Manif en Allemagne. KEYSTONE
Justice 

En Suisse, il est légal de porter un t-shirt orné d’une croix gammée. L’Office fédéral de la justice a rendu jeudi un rapport sur l’interdiction des symboles nazis et racistes. Pour résumer: interdire est possible… mais compliqué. Cela passerait forcément par un durcissement de la loi – le fameux article antiraciste 261 bis du Code pénal, dont la portée est actuellement circonscrite aux actes véritablement outrageants.

Si l’on veut durcir la loi, la tâche risque de se révéler ardue. La norme doit être à la fois précise – tout un chacun doit savoir ce qui est légal ou pas  – et rédigée de manière ouverte pour que les tribunaux puissent tenir compte du contexte de l’acte. Mission impossible? S’il est facile d’inscrire dans la loi l’interdiction d’arborer la swastika, par exemple, cela ne permettra pas de lutter contre les idéologies de la droite extrême. Ses tenants trouveront d’autres biais pour propager leurs doctrines. En France, certaines dates ont ainsi été instrumentalisées: 732, la date de la bataille de Poitiers, par exemple. Et que faire de la «quenelle» de l’humoriste Dieudonné?

Il faut bien admettre que la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les idées anti-démocratiques ne se mène pas exclusivement dans le cadre de la loi. Elle passe d’abord par l’affirmation de valeurs claires, le rejet des porosités idéologiques et le refus de certaines alliances. Lorsque des membres du Parti libéral radical (PLR) fricotent avec les troupes d’Eric Zemmour, condamné pour incitation à la haine raciale, il n’est pas admissible que cela soit justifié au nom du débat d’idées.

Franchir certaines lignes rouges, c’est se placer hors de l’espace démocratique. Un danger sous-estimé. Pour nos pandores, la menace est encore trop souvent vue du côté des activistes de gauche, des luttes sociales ou environnementales. Or lorsque des nazillons paradent dans une manif contre les mesures Covid (en janvier dernier à Berne), lorsque des ratonnades sont lancées en France comme ce fut le cas mercredi en France à l’occasion du match opposant l’équipe tricolore au Maroc, quand les discours fielleux proférés sur les chaînes rachetées par un milliardaire d’extrême droite provoquent des passages à l’acte ou qu’un groupuscule armé en Allemagne envisage de renverser les institutions démocratiques, agir y compris sur le plan légal ou administratif contre ces dérives est possible et urgent.

Suisse Philippe Bach Justice 

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