Boycott or not?
Faut-il boycotter la Coupe du monde de football au Qatar? Ou du moins supprimer sa célébration collective au sein des désormais traditionnelles fan zones? A mesure que s’approche le Mondial qatari, le malaise grandit vis-à-vis d’une compétition compromise avec l’émirat gazier et les consignes fusent.
L’attribution de la Coupe du monde au pays golfien, il y a de cela une dizaine d’années, était une hérésie, déjà dénoncée alors. Tout le monde savait que la dizaine de stades polluants et surdimensionnés qui seraient construits dans des conditions extrêmes en plein désert n’auraient aucun avenir. Qu’un pont aérien serait nécessaire pour remplir les stades. Que l’événement légitimerait un régime moyenâgeux, parrain de l’islamisme radical.
La mobilisation contre les fan zones peut dès lors s’entendre, bien qu’elle ne soit pas exempte d’un certain mépris pour ce sport éminemment populaire. Les collectivités publiques indiquent par ce refus que l’édition 2022 ne peut être un Mondial comme les autres.
L’appel au boycott de la compétition, en revanche, laisse à son tour un certain malaise, sorte de punition collective, d’ascèse qu’on exigerait moralement de millions de passionné·es déjà passablement dépossédé·es de leur sport-roi par les lois du marché et ses mafias. Si l’émirat du Qatar a pu s’offrir sa danseuse footballistique, il le doit avant tout à la complicité du gouvernement français, qui a fait pencher l’UEFA (la fédération européenne de foot) vers Doha, et à celle des autorités suisses, qui ont laissé la corruption régner en maître à la Fédération internationale de football (FIFA).
Si l’on entend stopper cette dérive, qui vient de franchir un nouveau pallier en attribuant les Jeux d’hiver d’Asie de 2029 à l’Arabie saoudite, regarder ailleurs ne suffira pas, il faut agir sur les leviers du pouvoir. La Suisse, siège de l’UEFA, de la FIFA et du CIO, est particulièrement bien placée.
La campagne des ONG #PayUpFIFA va également dans ce sens, réclamant de la FIFA qu’elle prenne ses responsabilités en dédommageant les victimes des chantiers qataris avec les bénéfices de son Mondial. Sponsors et associations nationales sont invitées à soutenir la demande. A défaut, un boycott sonnant et trébuchant de Budweiser, Adidas, Coca-Cola, McDonald’s ou encore Visa aurait une autre allure, même si l’on sait l’efficacité toute relative de ce type d’actions!