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Une situation peu enviable

Suite à la votation du projet de réforme AVS 21, Hans-Peter Renk adresse une réflexion.
Politique

Les résultats de la votation fédérale sur le projet AVS 21 (25 septembre 2022) seront-ils l’occasion pour le Parti socialiste suisse (PSS) de reprendre les débats avortés de 1983 et de 1993 sur sa participation minoritaire au Conseil fédéral? En effet, au contraire de la justification donnée depuis 1929 – date à laquelle un congrès du PSS décida d’opter pour une telle option –, la possibilité d’influencer les partenaires bourgeois a totalement disparu depuis l’émergence dans les années 1980 d’un néolibéralisme arrogant. Les représentant·es du PSS dans le collège gouvernemental sont donc voué·es à la situation peu enviable d’avoir à défendre des projets antisociaux et à manger leur chapeau (nourriture fort indigeste, mais coiffure favorite d’Alain Berset).

La persévérance avec laquelle le «socialiste» Alain Berset défend des contre-réformes en matière de retraites devrait faire réfléchir les militant·es et sympathisant·es sincères du PSS. En effet, en 2014 déjà, le quotidien du grand capitalisme suisse, la Neue Zürcher Zeitung (NZZ) accueillait la prose édifiante de ce conseiller fédéral à propos de son précédent projet PV2020: «Ce paquet contient beaucoup de mesures qui ont été depuis longtemps proposées par les bourgeois: l’élévation de l’âge de la retraite des femmes, la baisse du taux de conversion ou encore le mécanisme d’intervention sur l’AVS. Tout est dedans!» (NZZ du 21 novembre 2014).

Les militant·es et sympathisant·es du PSS devraient méditer cette lointaine prédiction, formulée en 1899 par le regretté Paul Lafargue (gendre de Karl Marx, militant du Parti ouvrier français et auteur d’un pamphlet immortel, Le droit à la paresse: «Le socialiste ministre concourt pour sa part, petite ou grande, directe ou indirecte, à la bonne exécution des mesures que prend le Conseil des ministres, non pour développer le socialisme, mais pour avancer les affaires du Capital». Depuis, les exemples ont été légion, aurait dit un centurion romain…

Ils/elles pourraient aussi méditer ce propos du regretté militant français Marceau Pivert, socialiste de gauche (non, ce n’est pas un pléonasme!), fustigeant en mai 1958 le ralliement du secrétaire général de son parti, Guy Mollet, au régime gaulliste, issu – on l’a trop souvent oublié – du coup d’Etat militaire du 13 mai 1958 à Alger: «Il n’est plus possible de coexister avec celui qui a choisi aussi cyniquement de servir la classe bourgeoise» (Correspondance socialiste internationale, n°85, juin 1958).

Hans-Peter Renk,
Le Locle

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