Édito

Recomposition en marche?

Recomposition en marche?
KEYSTONE
Elections françaises

Depuis quelques jours, un vent de panique soufflait en macronie. Les attaques ad hominem sont sorties du cadre de la bienséance démocratique. La Nupes (Nouvelle Union populaire, écologique et sociale) a été dépeinte – défense de rire – comme sortant du cadre républicain, composée d’islamo-gauchistes, voire d’antisémites. Lorsque le point Godwin est de la sorte atteint, c’est bien que la boîte à idées sonne creux.

Hier, le couperet est tombé: La République en marche d’Emmanuel Macron a perdu la majorité absolue qu’elle détenaient à l’Assemblée nationale. Elle reste devant la Nupes de Jean-Luc Mélenchon mais devra composer. Et plusieurs de ses têtes de gondole boivent la tasse.

Institutionnellement, dans le régime présidentiel français, cela n’ira pas de soi. Mais c’est sans doute une bonne nouvelle pour la démocratie. La majorité automatique avec des députés-godillots ânonnant leur catéchisme marcroniste et votant le doigt sur la couture du pantalon durant cinq ans avait quelque chose de pathétique.

Et, politiquement, cela permettra de clarifier les positions. La fin de la baudruche du «ni de droite ni de gauche». Car l’allié naturel de la majorité relative présidentielle se trouvera très probablement du côté des Républicains qui ont sauvé les meubles. Même si, sur des sujets importants – on pense à l’enjeu climatique – des alliances plus larges ne sont pas totalement exclues. Mais la lucarne sera étroite.

La deuxième dynamique émergeant de ce scrutin dominical est bien sûr la recomposition de la gauche. Le vaisseau amiral de la nouvelle coalition sera bien composé des Insoumis, Union populaire dans sa nouvelle appellation, même si le Parti socialiste et les Verts gardent leur part d’autonomie. Comment cette reconstruction va-t-elle se conduire, selon quelles valeurs et avec quelles priorités? Le vent de panique macronien a aussi soufflé sur les terres du social-libéralisme. Les sorties un brin indécentes durant la campagne d’un François Hollande donneur de leçons et incapable d’autocritique sont-elles son chant du cygne ou le naturel va-t-il revenir au galop?

Enfin, troisième donnée: l’extrême droite réalise un score historique dans un scrutin qui ne lui est pas favorable. Là aussi, la responsabilité du président réélu est lourde. Lui et ses troupes ont participé à la banalisation d’idées antidémocratiques et racistes. Ils ne sont pas les seuls – on pense aux dérives d’un Manuel Valls – mais leur responsabilité est lourde. Jusque dans la répression des mouvements sociaux qui marque clairement une sortie de route démocratique.

Le combat contre cet ennemi doit redevenir une priorité pour la gauche Elle ne doit plus se laisser intimider par les chiens de garde de l’éditocratie qui n’ont eu de cesse d’attaquer sur ce terrain au nom du «réalisme» et des prétendues priorités des Français·es, en banalisant des thématiques indécentes. Le peu de succès, voire le ridicule, de ces attaques, est rassurant. Les vraies priorités sont ailleurs: crise climatique, question sociale, lutte contre les discriminations raciales et de genre… C’est à l’aune de ces enjeux qu’il conviendra de juger la recomposition de la gauche qu’il faut appeler de nos vœux.

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