Édito

Escalade dans l’horreur

Escalade dans l’horreur
Un Ukrainien armé en poste dans la ville de Boutcha, où près de 300 civil·es pourraient avoir été exécuté·es sommairement par l'armée russe. KEYSTONE
Guerre en Ukraine

Un tournant dans le conflit sanglant de l’invasion de l’Ukraine par les troupes russes? En tous les cas, la découverte de centaines de cadavres après le retrait des troupes russes de la ville de Boutcha a provoqué une onde de choc. Près de 300 civil·es pourraient avoir été exécuté·es sommairement. Certains des corps avaient les mains liées dans le dos et avaient reçu une balle dans la nuque.

Alors, bien sûr, il convient de rester prudent – des précédents de manipulation existent, par exemple les charniers de Timisoara, lors de la chute du régime de Ceausescu – mais dans le cas d’espèce, un rapport de Human Rights Watch et des sources onusiennes semblent concorder. Amnesty International fait également état de l’usage d’armes proscrites par le droit international, notamment les bombes à sous-munitions.

Plusieurs enquêtes sont d’ores et déjà lancées. Notamment celle de la Cour pénale internationale. C’est heureux, car cela permettra d’y voir plus clair. Et, espérons-le, de lancer un certain nombre de mandats d’arrêt internationaux montrant la détermination de ne pas laisser de tels crimes impunis.

N’abusons toutefois pas du terme de génocide, comme le fait le gouvernement ukrainien. Cette notion répond à un contenu très précis. En revanche, si ces faits sont avérés, cela s’apparenterait bien à des crimes de guerre. Ce qui s’inscrit dans une certaine logique. Un conflit armé génère ce genre de barbarie humaine. Et n’est pas réservé aux régimes antidémocratiques comme celui de Vladimir Poutine. Des pays se voyant à l’avant-garde de la démocratie comme les Etats-Unis ont eux aussi vu leurs troupes commettre des horreurs. Souvenons-nous du massacre de My Lai, en 1968, au Vietnam.

Mais, pour rester dans le domaine de la sémantique, à systématiquement qualifier de «nazis» les Ukrainiens, le maître du Kremlin alimente la chaudière nationaliste à préjugés. Une forme de déshumanisation et de stigmatisation qui peut ensuite conduire – dans un contexte d’hyperviolence – à ce genre de crimes. Le nihilisme généré par les horreurs de la Première Guerre mondiale a ainsi nourri, bien des études d’historien·nes l’ont montré, et servi de matrice au totalitarisme nazi. En cela, ces images doivent servir d’avertissement. C’est bien à une escalade dans l’horreur que nous risquons d’assister. Cela suppose des pays occidentaux la capacité de laisser la porte ouverte à un processus de paix digne de ce nom. Et une fermeté certaine à même d’éviter la fuite en avant mortifère dans laquelle s’est engagé Vladimir Poutine. Une voie pour le moins étroite.

Opinions Édito Philippe Bach Guerre en Ukraine

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