Édito

La crise, quelle crise?

La crise, quelle crise?
Le Conseil d'Etat a présenté les comptes 2021 à la presse jeudi. KEYSTONE
Genève

Y a-t-il eu une crise à Genève en 2021? La question se pose légitimement après la présentation des comptes du canton qui ont révélé une surprise de taille: 1,5 milliard de recettes fiscales supplémentaires par rapport à ce qui avait été prévu, et ce sur un budget de 9,5 milliards…

Cette situation prouve en premier lieu que les récentes réformes engagées – RFFA, subside-maladie, CPEG – ont été amorties plus vite que prévu. Elle illustre ensuite ce que nous savions déjà: pendant la pandémie et la crise économique qui a suivi, certains secteurs, en particulier au bout du lac l’horlogerie – merci aux RHT financées par la Confédération –, la finance et le commerce international, ont fort bien tiré leur épingle du jeu. Certains ont gagné beaucoup d’argent. D’où des rentrées fiscales extraordinaires liées aux personnes morales et à l’immobilier.

Le pessimisme des prévisions de l’administration fiscale interroge également. A force d’être systématique, cela en devient suspect. Prévoir des recettes exagérément en deçà de la réalité pousse forcément à réduire les dépenses. A ce titre, rappelons que Genève se distingue des autres cantons suisses par son incapacité à voter un budget. Ainsi, en 2022, l’Etat vit au rythme des «douzièmes provisoires», soit un montant identique sur douze mois à celui de l’année précédente.

Or non seulement la crise n’est pas une chimère pour la majorité de la population, mais en plus elle n’est pas terminée. Les revenus de l’imposition des personnes physiques sont d’ailleurs moins importants qu’escompté. Avec le Covid-19, le service public a été mis sous tension comme jamais. L’année dernière, les postes demandés par le Conseil d’Etat pour assurer le maintien des prestations, proportionnellement aux besoins et à la croissance démographique, ont été refusés par la droite parlementaire, au nom de la doxa néolibérale et du frein au déficit. Un argument qui ne tient plus la route désormais. Sauf pour le PLR qui, à un an des élections, ose exiger une baisse linéaire de 5% de l’imposition des personnes physiques pour continuer à vider les caisses.

Quant à l’exécutif à majorité de gauche, il ne semble guère enclin à apprendre de ses erreurs. Tout au contraire, il agite le spectre de la guerre en Ukraine pour légitimer son extrême prudence à venir. Alors que les besoins sont immenses, tant pour décarboner notre société que pour répondre aux besoins élémentaires dans les hôpitaux, les écoles, l’aide à domicile ou l’office médico-pédagogique, pour ne citer que quelques exemples. Les futures votations sur deux initiatives fiscales de la gauche pourraient-elles changer la donne?

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