Triste anniversaire
Il y a un an très exactement, quelque 600 policiers·ères évacuaient la ZAD (Zone à défendre) du Mormont. La fin d’une expérience qui aura tenu six mois sur le plateau de la Birette pour contester le projet d’extension de la carrière gérée par le cimentier Holcim et plus largement la civilisation du béton. Quel bilan tirer de cette expérience? On peut dénoncer le peu d’écoute des autorités vaudoises face à ce moment de démocratie directe, vécue voire réinventée chaque jour.
L’évacuation fut musclée et frisa parfois le code. La liberté de la presse fut notamment malmenée, deux journalistes du Courrier présent·es sur les lieux, mais pas embedded dans les fourgons de la police, furent expulsé·es.
Et l’acharnement judiciaire dont fait preuve le Ministère public ne laisse pas d’inquiéter. Holcim a retiré sa plainte. Las, le parquet la reprend à son compte et poursuit les zadistes avec un acharnement et un zèle certain. Ainsi, celles et ceux qui avaient refusé de décliner leur identité ont été identifié·es et poursuivi·es… mais sans possibilité de recours, ce qui est tout de même une des bases de l’Etat de droit. Pire. Leurs avocat·es sont eux aussi harcelé·es et prié·es de s’acquitter de leur poche des frais judiciaires. Une situation difficile à vivre pour des militant·es souvent jeunes – entre 20 et 25 ans pour la plupart – qui se retrouvent pris·es dans un engrenage.
Cet alignement de l’autorité sur les intérêts du géant de la cimenterie est révélateur d’une logique systémique: doux avec les puissants – Holcim n’a pas été inquiété pour avoir démoli en douce une bâtisse servant à abriter les zadistes –, sévère avec les faibles.
Mais un peu d’optimisme est aussi de mise. A celles et ceux qui sortent lessivé·es et démoralisé·es de cette lutte et des poursuites qui l’accompagnent, on ne peut que les inviter à considérer le long terme. Ces moments de politisation sont rarement perdus. Sur la plan individuel, bien sûr, leur rapport au politique ne sera plus jamais le même. Et sur le plan collectif, aussi. Cette lutte posait et pose toujours des questions essentielles sur le devenir de nos sociétés. Les pistes ouvertes par les zadistes ne sont peut-être pas toutes réalistes – casser la glace en hiver pour faire son café n’est pas donné à tout le monde –, mais elles méritent toute notre attention, davantage que le capitalisme vert qu’on est en train de nous vendre et dont on sait déjà qu’il ne résout rien et sert surtout à détourner l’attention des vrais enjeux de l’urgence climatique.