Édito

Acharnement judiciaire plutôt que réponse politique

Brouillon auto 352
Arrestation d'un militant du climat pendant l'évacuation de la ZAD du Mormont, le 30 mars 2021. KEYSTONE
ZAD du Mormont

Sept audiences séparées pour sept zadistes. Lundi s’ouvrira un procès à Nyon dans le cadre de l’évacuation de la colline de Mormont, où Holcim veut agrandir sa carrière pour produire du béton. Au détriment de la biodiversité et du climat. Les activistes opposé·es au projet et qui y avaient installé une ZAD (zone à défendre) risquent jusqu’à six mois de prison pour cette action de résistance civile non violente.

A ce stade, on ne peut être que très inquiet des méthodes des différents pouvoirs vaudois. Ceux-ci ont véritablement sorti l’artillerie lourde. L’évacuation s’est faite de manière pour le moins musclée. Et en violant allégrement certains droits fondamentaux comme la liberté de la presse.

Le volet judiciaire n’est guère plus rassurant. Des militant·es ont été inculpé·es sur la base de prélèvement ADN. Il leur est interdit désormais de recourir et leur avocate n’est pas reconnue par le pouvoir judiciaire, car ils et elles avaient refusé de donner leur identité. Enfin, le procès qui s’ouvre lundi est quasiment à huis clos.

Ceci alors qu’Holcim a retiré sa plainte. L’Etat vaudois s’est donc empressé de reprendre à son compte les intérêts de ce groupe privé. Ce n’est plus du zèle, on est plus proche du fayotage.

Amnesty International a tiré la sonnette d’alarme et rappelé à la Suisse quelques éléments constitutifs de l’Etat de droit. Et ce week-end, trois rapporteurs spéciaux de l’Organisation des Nations unies (ONU) ont à leur tour donné de la voix et fait part de leur «préoccupation», en rappelant que la désobéissance civile pacifique est protégée par le droit international.

Las, les autorités vaudoises se veulent droites dans leurs bottes et dénient son caractère idéal à la lutte des zadistes. Il s’agirait plutôt «de groupes hétérogènes, d’obédiences diverses, animés par des causes, des objectifs et des modes d’action divergents». Une prose qui fleure bon la langue de bois militaro-policière. Ne manque plus que l’accusation d’infiltrations «cosmopolites».

Vu la tournure que prend cette affaire et les doutes qu’on peut avoir sur un procès équitable, il est fort à parier que l’affaire finira, sinon à Strasbourg, du moins au Tribunal fédéral. Désolant, car ce qui est posé par ce mouvement mérite mieux qu’une guérilla judiciaire. C’est bien l’avenir de nos sociétés et la capacité que nous avons de nous inventer un avenir durable qui sont au cœur du débat. Et cela, ce n’est pas à quelques juges de le décréter mais doit plutôt être réglé politiquement. Et si possible démocratiquement.

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