Édito

Des JO en confinement politique

Des JO en confinement politique 
Pékin avait déjà organisé en 2008 des Jeux olympiques, d’été cette fois-ci. En quatorze ans, bien des choses ont changé et bien des espoirs ont été douchés. Photo: manifestations contre l'occupation du Tibet ce jeudi à Lausanne. KEYSTONE
Chine

Les Jeux olympiques 2022 s’ouvrent officiellement ce vendredi. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le fond de l’air est frais, pour ne pas dire totalitaire. Les conditions drastiques imposées aux participant·es et aux quelques visiteur·euses donnent à l’exercice un côté orwellien. 

Pékin avait déjà organisé en 2008 des Jeux olympiques, d’été cette fois-ci. En quatorze ans, bien des choses ont changé et bien des espoirs ont été douchés. Il était alors possible d’espérer une évolution vers davantage de démocratie du régime chinois, nonobstant l’écrasement du mouvement étudiant sur la place Tian’anmen en 1989. Difficile d’imaginer un tel changement aujourd’hui: le Tibet toujours occupé, les Ouïghours du Xinjiang internés dans des camps par millions et la démocratie écrasée à Hongkong! Sans parler du refus du régime de jouer la transparence dans la pandémie du Covid-19. La preuve que l’économie de marché ne rime pas avec l’idéal de liberté, contrairement à ce que nous vend la doxa néolibérale. 

Ce glissement autoritaire ne sera pas sans conséquences. D’aucuns voient la Chine comme le prochain centre du système-monde capitaliste. Mais cet étouffement des libertés peut aussi se révéler un redoutable obstacle au développement. On n’écrase pas impunément les âmes et les consciences. Cela se paie en termes de créativité, d’imagination, de dynamisme.

Dans ce contexte étouffant, on peut regretter la position pusillanime de la Suisse. Mais pas s’en étonner. Cela fait partie de notre ADN. Peu de leaders – à part Vladimir Poutine – feront le déplacement à Pékin. La Suisse n’y fera pas exception, à part le conseiller d’Etat vaudois Philippe Leuba. Dam, Lausanne est aussi la capitale de l’olympisme. Mais les autorités fédérales se réfugient derrière l’argument de la crise sanitaire. On peut y voir une prudence diplomatique. Mais on peut aussi et surtout déplorer cet attentisme un brin hypocrite. 

Il est vrai qu’un marché de 1,4 milliard d’habitant·es fait saliver l’industrie exportatrice suisse. Reste que cela donne aussi un arrière-goût amer à l’accord de libre-échange que la Suisse a cru bon de signer avec le géant asiatique. Au-delà des soucis de la paysannerie suisse, des valeurs fondamentales étaient aussi en jeu. Elles n’ont guère pesé au royaume de la Realpolitik économique.

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