Agora

Protéger la jeunesse contre les graves dangers du tabac

Une quinzaine de personnalités genevoises, au rang desquelles des élu·es de différents bords, des spécialistes de la prévention du tabagisme et d’autres professionnel·les de la santé, ont signé un texte appelant la population à se mobiliser en faveur de l’initiative fédérale «Enfants sans tabac». Extraits.
Votation fédérale

De nombreuses études montrent qu’une interdiction totale de la publicité pour le tabac réduit en moyenne de 7,4% le nombre de fumeurs dans la population. L’initiative «Enfants sans tabac» sur laquelle nous voterons le 13 février prochain rallie derrière elle un large front, des milieux de promotion de la santé aux faîtières d’associations médicales et de protection de la jeunesse et des élu·es de gauche comme de droite. L’initiative augmentera les chances des jeunes de ne pas commencer à fumer. Elle permettra également de diminuer les coûts du tabagisme qui s’élèvent à 5,6 milliards par année. Elle rendra possible la ratification de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT) et permettra à la Suisse de se conformer aux buts visés par la Convention de l’ONU relative aux droits de l’enfant.

La publicité pour le tabac est aujourd’hui très présente avec des stratégies multiples, imaginatives et sophistiquées ciblant en particulier les jeunes. Plusieurs études récentes ont montré une relation entre le fait d’être exposé à la publicité pour le tabac et le risque qu’un jeune commence à fumer bien avant l’âge adulte. En Suisse, 57% des fumeurs et fumeuses ont commencé à consommer du tabac avant l’âge de 18 ans. Plus on commence à fumer tôt, plus le risque de développer une dépendance durable est élevé.

L’adolescence est une période de transition cruciale. Les adolescent·es ont besoin du regard de leurs pairs dans lequel ils peuvent se projeter et qu’ils considèrent comme des modèles. Cette recherche de conformité passe par des conduites telles que le renforcement ou l’imitation. Adopter un comportement conforme au groupe est d’autant plus attirant pour les jeunes que cette conformité va de pair avec la transgression d’un interdit. C’est ainsi que la promotion d’un produit comme la cigarette ou le vapotage avec sa gestuelle, relayée par des influenceurs, peut jouer un rôle très pernicieux auprès des jeunes. Cela fait partie de la stratégie de l’industrie qui utilise ces relais efficaces, visibles par les jeunes mais très peu par les adultes.

Le contre-projet indirect à l’initiative est le résultat du puissant travail de lobbying de l’industrie du tabac. Il n’est pas efficace car la publicité sera toujours possible dans la plupart des lieux accessibles aux enfants et aux jeunes, sur internet, les réseaux sociaux, dans les festivals et les points de vente. A l’appui de son refus de l’initiative, l’industrie du tabac met en avant sa contribution à l’économie suisse, en particulier aux emplois. Or, les chiffres qu’elle avance ne font pas la différence entre les emplois liés aux activités internationales des multinationales basées en Suisse et les emplois liés au marché suisse du tabac. La manufacture du tabac ne fait usage que de 3% du tabac cultivé en Suisse; 75% des cigarettes fabriquées en Suisse sont exportées. Au lieu des 11 500 emplois impactés selon les chiffres biaisés de l’industrie, seuls 200 emplois dans le secteur du tabac seraient menacés, et de façon très graduelle.

Le Conseil fédéral a reconnu dans son message que l’interdiction de la publicité pour le tabac pourrait entraîner le transfert de places de travail vers d’autres secteurs économiques. L’argent qui n’est pas dépensé pour les produits du tabac le serait à d’autres fins de consommation. Au vu de la lucidité de ce constat, la position du Conseil fédéral est aussi incompréhensible que problématique. Pour justifier son refus de l’initiative, le gouvernement a exprimé sa volonté «de restreindre la publicité dans une mesure acceptable à l’industrie du tabac». Le 13 février prochain, la population suisse a une opportunité précieuse de prendre une mesure concrète pour protéger la santé de la jeunesse, et limiter les graves dégâts socio-sanitaires et environnementaux occasionnés par le tabac.

Laurence Fehlmann Rielle, conseillère nationale,

Prof. Jean-Paul Humair, méd., directeur du Centre d’Intervention pour la prévention du tabagisme (CIPRET-Genève),

Emmanuel Deonna, député,

Pascal Diethelm, président d’OxySuisse,

Didier Bonny, député,

Patricia Borrero, présidente de la section genevoise de l’Association des infirmières et infirmiers (ASI),

Dr Pierre Conne, président de la Ligue genevoise contre le cancer,

Christian Dandrès, conseiller national,

Prof. Pierre-Yves Dietrich, chef du Département d’oncologie des HUG,

Prof. Paola Gasche, pneumologue, HUG,

Jean-Marc Guinchard, député,

Jocelyne Haller, députée,

Prof. François Mach, Chef service cardiologie, HUG,

Dr Michel Matter, conseiller national et président de l’Association des médecins de Genève (AMG),

Isabelle Pasquier-Eichenberger, conseillère nationale,

Dr Souheil Sayegh, député.

Opinions Agora Votation fédérale Tabac Publicité

Dossier Complet

Votations fédérales du 13 février 2022

mardi 18 janvier 2022
La population suisse vote sur deux initiatives, l’interdiction de l'expérimentation animale et la protection contre la publicité pour le tabac; ainsi que sur deux lois, le droit de timbre et l’aide aux...

Connexion