Édito

Retirer le soutien à l’apartheid d’Israël

Retirer le soutien à l’apartheid d’Israël
«Que ce soit dans la bande de Gaza, à Jérusalem-Est, à Hébron ou en Israël, la population palestinienne est traitée comme un groupe racial inférieur et elle est systématiquement privée de ses droits», écrit Amnesty international. KEYSTONE/ARCHIVES
Israël 

«L’apartheid d’Israël contre la population palestinienne. Un système cruel de domination et un crime contre l’humanité». Le titre du nouveau rapport d’Amnesty international, publié mardi, clarifie on ne peut mieux la position de la plus grande ONG des droits humains sur cette question jusqu’ici controversée. Les lignes ont bougé ces dernières années, en particulier avec la publication en 2017 d’un rapport mandaté par l’ONU, vite mis sous le tapis, qui qualifiait déjà la situation dans les territoires occupés et en Israël même de crime d’apartheid. De nombreuses ONG et des universitaires avaient déjà pris position en ce sens, notamment l’Union juive française pour la paix et des historiens israéliens comme Ilan Pappé. Puis, tout s’est accéléré en 2021: début janvier, l’organisation israélienne des droits humains B’tselem publiait sa propre étude intitulée «Un régime de suprématie juive: c’est l’apartheid». En juin, plus de 1000 artistes, intellectuel·les et universitaires de plus de 45 pays ont appelé explicitement au démantèlement de ce système.

Amnesty international se joint ainsi à ce mouvement de fond. Et rejoint la position majoritaire au sein de celui-ci: l’apartheid, à savoir «un régime institutionnalisé d’oppression et de domination mis en œuvre par un groupe racial sur un autre», concerne autant les Palestinien·nes des Territoires occupés que ceux qui vivent en Israël même, victimes de lois discriminatoires. «Que ce soit dans la bande de Gaza, à Jérusalem-Est, à Hébron ou en Israël, la population palestinienne est traitée comme un groupe racial inférieur et elle est systématiquement privée de ses droits», écrit l’ONG. Cette analyse est cruciale car elle tord le cou à l’idée que la communauté internationale pourrait se contenter de désapprouver la colonisation des territoires occupés et de sanctionner les acteurs commerciaux qui y opèrent, pour se conformer au droit international. Non, l’apartheid, codifié dans la Convention sur l’apartheid des Nations unies, est un crime contre l’humanité commis par l’Etat d’Israël sur l’ensemble de son territoire et au-delà. Et, en conséquence, appelle à une réponse politique globale et ferme des autres pays.

On en est très loin. Plutôt que d’exercer leur compétence universelle afin de traduire en justice les responsables de ces crimes, de saisir la Cour pénale internationale et de prononcer des sanctions, les Etats-Unis, l’Europe et la Suisse continuent d’entretenir des liens commerciaux et militaires privilégiés avec Israël, sans même brandir la menace de la suspension de ceux-ci. Mais avec la prise de conscience actuelle et la mobilisation générale de la société civile, le vent pourrait tourner.

Opinions Édito Christophe Koessler Israël  Israël-Palestine 

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