Édito

Lundi, le changement sera en violet

Lundi, le changement sera en violet
Les membres du Collectif Genevois pour la grève féministe. KEYSTONE/Martial Trezzini
Grève féministe

Cette année, la grève féministe du 14 juin aura un goût particulier: elle se tiendra quelques jours seulement après que le parlement, aveugle et sourd, a décidé d’élever la retraite des femmes à 65 ans. Aveugle aux autres solutions existantes (notre édito de jeudi), sourd à toutes les voix s’élevant dans le pays pour s’opposer à cette mesure: car les inégalités entre hommes et femmes sont encore bien trop importantes pour songer à réclamer une «égalité» en la matière. Les syndicats lanceront un référendum, la démocratie suisse est une bataille de tous les instants.

De quoi nourrir encore la colère qui anime les femmes en Suisse. Les discriminations salariales qu’elles dénoncent depuis des décennies non seulement n’ont pas reculé, mais ont augmenté en 2018 – dernière année de référence de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS). Et c’est dans l’industrie pharmaceutique que la part non explicable de la différence salariale est la plus forte. Malgré la Loi sur l’égalité de 1996, des femmes continuent à être licenciées enceintes ou à leur retour de congé maternité. Quand elles en ont un: en Suisse, toutes ne sont pas protégées durant cette période particulière de l’existence. Et des milliers de paysannes travaillent sans statut et sans rémunération, sans accès, donc, à une protection sociale digne de ce nom. La précarité à la retraite est elle aussi bien réelle et pèse particulièrement sur les femmes, qui sont une sur trois à ne toucher aucun deuxième pilier. Signe qui ne trompe pas, l’initiative populaire pour une treizième rente AVS a recueilli ses signatures en un temps record malgré la pandémie. Quant à pouvoir concilier dignement vie privée et vie professionnelle, on est loin du compte.

On dit la colère nourricière. Elle l’est particulièrement en violet. Depuis 2019, la Grève féministe a démontré sa capacité à se mobiliser sur plusieurs fronts (juridique, climatique, etc.), à penser en réseau, s’alliant par exemple à la Grève pour l’avenir qui le lui rend bien, et à rendre visibles des inégalités qui l’étaient peu, à l’image des luttes paysannes. Surtout, cette colère ose revendiquer un véritable changement de société, plus durable et réellement viable pour toutes les personnes qui la composent. Oser revendiquer un tel changement est un geste puissant: c’est permettre de le penser. Et commencer à y travailler, âprement et, pourquoi pas, joyeusement.

Opinions Édito Dominique Hartmann Grève féministe

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La mobilisation se poursuit lundi 14 juin 2021, trente ans après la première grève féministe. Pour cette édition, l'accent porte sur l'inégalité salariale entre femmes et hommes, et sur les retraites.

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