Économie

Des rentes plus vertes et sociales

Des rentes plus vertes et sociales
Les caisses de pensions représentent le premier groupe d’investisseurs en Suisse. Mais les travailleurs et les travailleuses ne savent souvent rien des entreprises que leur argent soutient. KEYSTONE
Finance durable

La première fortune du pays, rien que ça! Avec quelque 1100 milliards de francs1>Chiffre Alliance climatique, mai 2021, les caisses de pensions représentent le premier groupe d’investisseurs en Suisse. Mais les travailleurs et les travailleuses ignorent souvent de quoi sont faites leurs rentes, et ne savent rien des entreprises que leur argent soutient. Les institutions de prévoyance prennent-elles déjà le chemin «de la neutralité carbone en respectant les critères de durabilité et les droits de l’homme», comme le demande le Manifeste de la Grève pour l’avenir? Organisations environnementales et syndicats ont mis le pied dans la porte pour que la lumière soit faite sur les transactions de ces géants de la finance.

Aujourd’hui, la plupart des portefeuilles des institutions de prévoyance oscillent entre devoir de rentabilité et transition – plus ou moins sensible – vers des investissements durables. Un équilibre que résume la Caisse de pensions de l’Etat de Vaud (CPEV): «Les caisses de pensions doivent s’assurer que les mesures qu’elles mettent en place sont ambitieuses (avec un impact fort) mais réalistes (c’est-à-dire mesurables et applicables) et qu’elles ne contreviennent pas à l’objectif de la caisse, qui est de prévoir des prestations de retraite pour les assurés et de les couvrir contre les risques liés au décès et à l’invalidité.» Du côté de son homologue genevoise, la CPEG, on assure que les critères ESG – pour environnement, social et gouvernance – sont appliqués à l’ensemble du portefeuille, comme le prévoit la loi cantonale. Dans un cas comme dans l’autre, cela ne garantit pas que l’ensemble des investissements sont durables, mais permet de mettre dans la balance des intérêts autres que financiers. Ainsi la CPEV précise qu’«à risque/rendement égal le gérant qui prend en compte les aspects ESG sera favorisé», tandis que la CPEG mentionne des secteurs dans lesquels elle s’abstient d’investir comme l’armement, la production d’énergie nucléaire, les matières premières agricoles ou encore l’extraction et la production de charbon. Ceci «tout en mesurant l’incidence de ces exclusions sur la performance, les risques et les coûts».

«Les déclarations d’intention doivent se traduire par de réels changements des portefeuilles d’investissement, avec des exclusions strictes de certains secteurs», estime Umberto Bandiera, secrétaire syndical chez Unia et responsable de la commission «Caisses de pensions» de la Communauté genevoise d’action syndicale. C’est sous l’impulsion de cette cellule qu’est née en 2019 une charte éthique commune relative aux principes d’investissements responsables des institutions de prévoyance professionnelle. Un exemple qui fait des émules dans le reste du pays. «En tant que syndicats qui siégeons dans des conseils d’administration paritaires, nous avons un réel rôle à jouer pour assurer cette transition vers une finance durable. Car servir les intérêts des travailleurs et des travailleuses, ce n’est pas seulement assurer des retraites pour la prochaine génération d’assurées, mais aussi promouvoir une société globalement plus durable», affirme le délégué syndical.

Reste que mettre son nez dans les détails des investissements financiers reste une affaire d’initiées. Pour y voir plus clair, plusieurs organisations environnementales, comme l’Alliance climatique2> alliance-climatique.ch/rating-climatique/, publient régulièrement des classements des principales institutions de prévoyance. De quoi mettre en perspective les progrès de la filière, en constatant que seul 9% du volume d’investissement est respectueux du climat. Malgré des progrès soulignés, ni la CPEG ni la CPEV n’obtiennent dans ce classement le qualificatif «meilleure pratique», que 15 caisses seulement sur 115 décrochent.

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