Le culte du capitaine
Dynamique mais autoritaire: c’est l’image de Pierre Maudet qui ressort du rapport Fonjallaz. L’ex-juge fédéral a passé au crible la gestion du Département de l’économie par le conseiller d’Etat, candidat à sa succession au gouvernement genevois. Il est décrit comme un chef qui instaure un climat de peur et considère les collaboratrices et les collaborateurs comme des pions ou des citrons qu’on presse sans égard.
Le caractère et le fonctionnement de ce capitaine étaient connus. Mais dans un passé pas si lointain, les politiques et les médias pardonnaient tout à cet «enfant prodige». En outre, son management très dur, alors qu’il avait plusieurs directions générales et 4500 employé·es sous sa responsabilité, s’est concentré sur 35 personnes dont quelques cadres.
Pierre Maudet, lui, balaie les reproches à son égard, assumant d’avoir été exigeant pour répondre à l’urgence sociale due à la crise économique. Pourtant, être exigeant n’implique pas de se montrer brutal et humiliant. Celui qui veut incarner l’avenir de Genève révèle une façon de diriger particulièrement rétrograde, loin d’un management horizontal et moderne, fondé sur la confiance dans le personnel et sa participation aux décisions.
Certes, le juge Fonjallaz ne nie pas que les souffrances au sein du département sont aussi la conséquence du contexte de crise économique. Mais il ne s’y trompe pas non plus, cernant parfaitement le personnage: Pierre Maudet a vu dans cette crise l’occasion de «se repositionner sur l’échiquier politique».
Pour sévère qu’il soit, ce rapport est pourtant politiquement à double tranchant. Il permettra aux supporters·trices de Pierre Maudet de cultiver le culte de l’homme fort mettant au travail les fonctionnaires prétendument paresseux·euses – à l’opposé de la description qu’en fait l’expert.