Des défis importants
S’il n’y a plus eu d’applaudissements lors de cette deuxième vague pour saluer le magnifique travail des soignants dans les hôpitaux, il y a eu en revanche une bonne couverture médiatique des défis qu’ils relèvent au jour le jour et sur le un de moyens déployés pour éviter que les hôpitaux en arrivent à faire de choix très difficiles.
Sur le terrain des EMS, en revanche, il me semble que les équipes soignantes ont à relever des défis largement aussi importants, mais avec des moyens moindres, puisqu’on entend que les soignants contaminés, en quarantaine ou encore en burn out ne sont pas remplacés, contraignant ici des directeurs à revêtir la blouse d’infirmier pour prodiguer des soins auprès des résidents, là une réceptionniste amener les plateaux de repas dans les chambres, faute de combattants… Tout ceci avec des semaines de travail qui s’enchaînent sans reprise d’heures, ni de week-ends de libres et des conditions de travail effarantes dont il me semble qu’elles ont été peu relayées dans les médias, à part la très épineuse question du droit de visite des famille à leurs proches résident en EMS.
On sait également que des personnes âgées atteintes du Covid sont intégrées en EMS, mais des moyens suffisants sont-ils attribués pour pouvoir prodiguer les soins qui s’imposent, avec des équipes affaiblies par le taux d’absentéisme massif des soignants? Quand on entend que certains EMS n’ont même pas d’oxygène, on peut se permettre d‘en douter. Ces EMS me paraissent être les parents pauvres des équipes soignantes, l’ultime maillon de la chaîne des soins dans laquelle les résidents occupent, eux aussi, l’ultime maillon de la chaîne de leur vie.
Comment se fait-il qu’une anticipation n’ait pas pu être planifiée pour mieux gérer cette deuxième vague, après l’expérience de la première, dans ces hauts lieux de contamination que sont les EMS? Et pourtant, on entend que des visites de contrôle sont effectuées pour vérifier que les plans de protection sont bien appliqués, mais est-ce bien la question, dans des EMS où par exemple les résidents sont atteints de démence ou de maladie d’Alzheimer et sont à mille lieues de pouvoir respecter ces plans? N’y aurait-il pas pu avoir d’autres mesures plus soutenantes à prévoir et à appliquer que celles relevant du contrôle, pour soutenir ce secteur tellement sensible? Ce secteur qui s’apparente à la dernière case du Jeu de l’oie, où les soignants accompagnent les résidents dans une solitude extrême quand ils ne peuvent plus sortir de leurs chambres, ou à la mort, quand plus rien ne peut être fait? Serait-ce que cette vision est si difficile à affronter qu’on préfère la laisser un peu de côté?
Par ces quelques mots, je tiens à rendre hommage aux équipes travaillant dans les EMS et à saluer bien bas les efforts démesurés qu’ils déploient pour accompagner nos aînés jusqu’au bout de leur voyage. Je vous demande de les publier dans le courrier des lecteurs pour compenser un peu le manque de visibilité dont ils me semblent faire les frais dans cette crise sanitaire.
Sophie Jéquier, Genève