Édito

Faire l’économie de la santé?

Faire l'économie de la santé
Des personnes manifestent avant le depot d'une petition pour la revalorisation des metiers des soins et d'entretien (HUG, IMAD, EMS), lors d'un rassemblement devant les Hopitaux universitaires de Geneve (HUG), ce mercredi 30 septembre 2020 a Geneve. (KEYSTONE/Salvatore Di Nolfi)
Covid-19

Le débordement des services hospitaliers n’est plus affaire que d’une à deux semaines. Avec près de six mille infections quotidiennes et un doublement hebdomadaire du nombre de cas, le mois de novembre s’annonce apocalyptique. Affronter cette vague, aussi puissante que la première, sans perturber l’économie ni affecter les finances publiques relève de la lubie, voire de la non-assistance à personnes en danger. On a vu ce printemps les dégâts occasionnés dans certains pays par l’opposition artificielle entre la santé de l’économie et celle de la population, y compris au niveau de leur PIB. Cette opposition binaire semble pourtant inspirer désormais la politique du Conseil fédéral et dans une moindre mesure des cantons.

Sans doute sermonné par le patronat après ses mesures relativement fortes du printemps, le gouvernement suisse se montre désormais aussi timoré qu’il semble divisé. De conférences de presse annulées ou vidées de leur contenu en propos contradictoires dans la presse, Berne a fini par laisser la patate chaude aux cantons.

On murmure que la Confédération pourrait reprendre un peu la main mercredi. Mais pour quelles mesures? Une action déterminée en faveur du télétravail? La suspension des services et productions non indispensables? Un subside aux travailleurs du secteur informel? Un impôt de crise sur les grandes fortunes et les bénéfices des entreprises? Ne rêvons pas: à en croire les fuites, le fardeau des nouvelles mesures anti-Covid pèsera essentiellement sur les individus, avec notamment la généralisation du masque et l’annihilation de la vie sociale. Travaille, consomme et protège-toi, et la Providence nous sauvera! Ou pas.

La providence, on la souhaite en particulier aux secteurs des loisirs, de la culture et de la restauration, qui continuent de fonctionner cahin-caha et sont donc censés subvenir à leurs besoins malgré des mesures sanitaires de plus en plus envahissantes. La tête juste assez enfoncée dans l’eau pour se noyer mais pas assez pour bénéficier d’un sauvetage collectif. Même le conseiller d’Etat PDC Christophe Darbellay s’en étranglait dans la presse dominicale.

L’économie, n’en déplaise aux fabulateurs libéraux, ne peut s’affranchir de la société, s’autorégulant en toutes circonstances comme par magie. Encore moins quand il s’agit d’affronter une crise sanitaire aiguë. Abattre ce virus passera aussi par une régulation spécifique des activités économiques. De la même façon que la sauvegarde des secteurs affaiblis nécessite un effort collectif. A contrario, une catastrophe sanitaire prolongée se paiera cash!

Sans attendre que le Conseil fédéral sorte de sa léthargie, les cantons ont une marge de manœuvre pour répondre à cette crise. Ainsi à Genève, le Conseil d’Etat devrait avoir la décence de retirer son projet de budget qui plombe les revenus et le moral de ses employés, bien souvent au front au cours de cette année cauchemardesque. Un signe élémentaire de respect et de solidarité, notamment avec des soignants toujours plus découragés. Mais aussi de cohérence entre le discours et le porte-monnaie.

Opinions Édito Benito Perez Covid-19

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