Édito

Ne pas rester les bras ballants

Ils rêvent d’école et vont à la mine
Parmi les mineurs artisans, on dénombre des dizaines de milliers d’enfants, de 6 à 17 ans, que l’extrême pauvreté force à abandonner l’école. DR
Solidarité

Difficile d’affronter l’implacable réalité du travail des enfants en République démocratique du Congo (RDC). Et pourtant, aussi longtemps que du cobalt y sera extrait pour finir dans nos téléphones, tablettes, ordinateurs, trottinettes ou voitures électriques, il faudra bien se poser la question des conditions dans lesquelles il est prélevé. Et ne pas rester les bras ballants face à l’horreur, face à la mort et la mutilation de préadolescents qui renoncent à l’école pour gagner 2 dollars par jour.

>>> Lire notre enquête

La filière artisanale est particulièrement mise en cause car les enfants ne sont pas intégrés aux processus industriels. Elle représente 30% de la production de cobalt en RDC et fait vivre les familles des 200 000 travailleurs. Toute solution simpliste est à exclure, au risque d’ajouter de la détresse à la misère.

Les autorités congolaises, les ONG, les organisations internationales et même l’industrie admettent que des dizaines de milliers d’enfants se rendent dans ces mines plutôt qu’à l’école. Pourtant, à l’heure d’identifier où s’écoulent leurs sacs de cobalt, on n’entend que le silence: chacun est prêt à reconnaître que le problème existe, mais pas chez soi. L’opacité de la chaîne d’approvisionnement permet de diluer les responsabilités. Les entreprises extractrices parviennent même à injecter des discours sur les droits humains dans leurs rapports d’activité en saupoudrant la région de programmes d’aide aux populations qui vivent dans une extrême pauvreté.

La Suisse, qui compte des géants du négoce de cobalt sur son sol, ne peut fermer les yeux sur les conséquences directes et indirectes de l’activité minière. Lorsqu’ils se déclarent blancs comme neige, ces opérateurs devraient apporter les preuves de leur diligence en la matière.

Ce devoir de diligence est justement prévu par l’initiative sur les multinationales responsables, sur laquelle les Suisses voteront en novembre. Une occasion de bannir les plus intolérables pratiques de l’extraction minière. Un acte politique à accompagner d’une diminution des achats de produits high tech. Car l’exploitation minière reste subordonnée à la consommation mondiale et, si l’industrie en est la première responsable, les citoyen-nes seront d’autant plus légitimes à exiger des comptes qu’ils et elles donneront l’exemple.

Une part significative de la population suisse a conscience de l’enjeu. Pour preuve: la multiplication aux balcons et fenêtres des drapeaux orange en soutien à l’initiative sur les multinationales, dans les villes autant qu’à la campagne. Et face à un public averti, aucun argument – pas même les emplois en jeu en Suisse – ne permettra de justifier l’incurie menant à l’exploitation d’enfants dans les mines du Haut-Katanga.

Opinions Édito Laura Drompt Solidarité Multinationales responsables

Autour de l'article

Connexion