Ghassan Kanafani, journaliste et écrivain révolutionnaire
Ghassan Kanafani était un journaliste, écrivain et leader révolutionnaire palestinien. Ce 8 juillet marque le 48e anniversaire de son assassinat à la voiture piégée par le Mossad israélien.
Né à Jaffa, sa famille est contrainte de quitter la Palestine lors de la «Nakba» («la catastrophe») en 1948, s’exilant alors à Damas. Après avoir vécu dans un camp de réfugiés, Kanafani devient ensuite enseignant dans une école de l’ONU. C’est pendant ses études universitaires qu’il commence son activité politique, après avoir rencontré George Habash. Avec ce dernier, Kanafani rejoint le Mouvement nationaliste arabe, s’installant à Beyrouth pour travailler au sein du magazine du mouvement: al-Hurriyya («Indépendance»).
Les années 1960 furent pour Kanafani une période d’intense activité journalistique et aussi littéraire, principalement après la publication de son grand roman Men in the Sun (1962). Cette activité coïncide avec l’intensification de la résistance armée palestinienne contre l’occupation, principalement après la création de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) en 1965.
Habash, Kanafani et d’autres fondent le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) en 1967, organisation intégrante de l’OLP, d’orientation marxiste-léniniste et anti-impérialiste. Le jeune écrivain est chargé de diriger l’organe du parti, al-Hadaf. La période précédant sa mort est ainsi marquée par une intense activité politique et militaire en résistance à l’occupation de la Palestine.
Écrivain aux multiples facettes, Kanafani a écrit de nombreux romans et essais. On pourrait croire qu’un auteur si directement impliqué dans la résistance contre l’occupation aurait tendance à écrire des histoires en «noir et blanc». Chez Kanafani, c’était tout le contraire. Ses histoires décrivent la réalité (tragique) des Palestinien·ne·s sous occupation, en exil ou dans les camps de réfugiés, mais les personnages sont réels, humains et pleins de contradictions.
Dans ses écrits, il s’est notamment tourné vers les enfants des camps de réfugiés comme personnages centraux, entourés de misère, de nostalgie et cherchant à comprendre leur identité en tant que Palestinien·ne·s. Un autre thème courant dans ses écrits était l’adhésion des jeunes aux mouvements fidayens. Kanafani déclarait que les écrivains palestiniens «écrivent pour la Palestine avec du sang», non pas comme un appel à la violence, mais pour illustrer que la réalité de l’occupation est inéluctable.
«Ma position politique vient du fait que je suis un écrivain. Mes positions et mon écriture sont donc indivisibles. J’ai acquis une conscience politique en étant écrivain, et non l’inverse.» Kanafani introduit le terme de «littérature de résistance», comprenant que la littérature, l’art en général, le simple fait de raconter son histoire était une forme de résistance pour le peuple palestinien.
Les positions radicales et l’importance croissante du FPLP ont fait du parti, ainsi que de Kanafani en tant qu’une de ses principales figures, des ennemis de plus en plus dangereux non seulement pour Israël mais aussi pour les Etats arabes voisins. Des pays comme la Jordanie ont toujours été plus intéressés par l’alliance avec les Etats-Unis que par le soutien à la cause palestinienne, et en sont venus à affronter directement l’OLP. L’assassinat de Kanafani a été un coup dur pour le mouvement révolutionnaire palestinien.
Dans une interview diffusée il y a quelques années, Kanafani expliquait à un journaliste australien la signification de la lutte du FPLP, et l’utilisation de la lutte armée en particulier. A la question de savoir si la mort ne devrait pas être évitée à tout prix, il répond que «pour nous [Palestinien·ne·s], libérer notre pays, avoir de la dignité, avoir le minimum de droits humains, c’est aussi essentiel que la vie elle-même.»
L’histoire récente a en quelque sorte donné raison à des personnages comme Kanafani qui a rejeté les négociations avec les autorités sionistes, ce qu’il a décrit comme «une conversation entre une épée et un cou». Après les accords d’Oslo, Israël a répondu à chaque concession des autorités palestiniennes par plus d’oppression, plus de violence et plus d’occupation. La soi-disante «communauté internationale», et les pays arabes en particulier, ont mis en avant des positions d’impuissance et de complicité.
Pour sa part, Ghassan Kanafani reste une référence pour les mouvements révolutionnaires, pour tous celles et ceux qui luttent pour un monde meilleur. Il a laissé ses écrits et surtout son exemple: l’engagement pour une cause juste jusqu’aux dernières conséquences.
L’association L’Atelier-Histoire en mouvement, à Genève, contribue à faire vivre et à diffuser la mémoire des luttes pour l’émancipation par l’organisation de conférences et la valorisation d’archives graphiques, info@atelier-hem.org