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Elections israéliennes: vers un troisième round?

AU PIED DU MUR

Deux campagnes électorales en six mois… Et voilà qu’avant même la prestation de serment d’une nouvelle Knesset, le spectre redouté d’un troisième scrutin se profile déjà. Pure folie. Netanyahou perd les pédales et, tel un joueur de casino, se persuade que cette fois il ramassera la mise. Au mois d’avril pourtant, le résultat du premier vote était loin d’être défavorable au Premier ministre. Mais insuffisant pour lui permettre de remporter l’enjeu qui motive l’ensemble de ses décisions: faire passer une loi lui permettant d’échapper à la justice, et vraisemblablement à la prison. Sous la menace d’une triple inculpation pour corruption, Netanyahou cherche désespérément un moyen de s’y dérober. Une bonne moitié de l’électorat n’est pas du même avis: dans les élections qui viennent de se dérouler, Netanyahou n’a plus la majorité.1>Au scrutin du 17 septembre, le Likoud est sorti 2e (32 sièges), derrière le parti Bleu-Blanc de Benny Gantz (33). En avril, les deux formations avaient engrangé 35 sièges chacune. Après l’échec d’un gouvernement de coalition, Benyamin Netanyahou a dissous le Parlement et provoqué un nouveau scrutin. Les commentateurs prédisent que s’il devait y avoir un troisième round, il perdrait encore des voix – et donc sa dernière chance de se soustraire à la justice.

Depuis trois semaines, entre la droite menée par le Premier ministre et le centre-droite des généraux Gantz, Ashkenazi et Yaalon, c’est match nul. Aucun des deux blocs ne peut constituer un gouvernement. Face à une telle impasse, le président israélien Reuven Rivlin est sorti de son devoir de réserve en appelant publiquement à un gouvernement d’union nationale. Aucun problème en termes de programme politique puisque, dans ce domaine, Gantz et Netanyahou, c’est bonnet blanc et blanc bonnet. Mais les généraux ont mené campagne sur la promesse de ne pas participer à un gouvernement dont le leader est mis en examen. En clair: le Likoud, oui; Netanyahou, non. Ils espèrent donc convaincre une partie du Likoud à se séparer de celui qui les dirige depuis près de quinze ans. C’est mal connaître le parti du Premier ministre, devenu un mouvement moutonnier qui suit sans se poser de questions – au risque d’être entraîné à sa suite dans le fleuve.

Netanyahou est prêt à tout pour échapper à la justice, y compris à prendre le risque d’un troisième round. A moins que l’hypothèse de plus en plus évoquée d’une loi d’amnistie (ou une grâce présidentielle) en échange d’un retrait définitif de Netanyahou de la vie politique ne se réalise. Le problème est que dans la classe politique peu nombreux sont ceux encore prêts à accorder crédit à un engagement du chef du Likoud. Serait-il vraiment disposé à se retirer des affaires? Sa femme Sara et son voyou de fils accepteraient-ils de quitter la résidence ministérielle de la Rue Balfour à Jérusalem et de retourner au statut de simples citoyens dans leur luxueuse villa de Césarée? Plus vraisemblable est donc, malgré tout, l’option d’une grande coalition avec Gantz et son quarteron de généraux, ces derniers acceptant de se parjurer «dans l’intérêt de la nation».

Notes[+]

Notre chroniqueur est militant anticolonialiste israélien, fondateur du Centre d’information alternative (Jérusalem/Bethléem).

Opinions Chroniques Michel Warschawski

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lundi 8 janvier 2018

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