International

Faute politique

Faute politique
Le premier ministre Pedro Sánchez et la députée Carmen Calvo au parlement, ce 18 septembre 2019. Pedro Sánchez a échoué à former un gouvernement, multipliant les obstacles vers une gauche unifiée. KEYSTONE
Espagne

Plus qu’un échec, une faute. Après cinq mois de danse du ventre, Pedro Sánchez a donc renvoyé les Espagnols aux urnes, le 10 novembre. Pour la sixième fois en quatre ans, locales et européennes comprises, soulignent certains. Pas de quoi fouetter un chat vu de Suisse, même si un peu de stabilité serait la bienvenue pour reconstruire un Etat digne de ce nom après le funeste mandat de Mariano Rajoy.

La faute du leader socialiste, qui disposait d’une majorité relative au parlement, est ailleurs: c’est d’avoir jeté aux orties la victoire de la gauche du 28 avril. Un scrutin législatif, rappelons-le, tenu sous la menace d’une coalition des droites et de la montée des néofascistes de Vox. Un scrutin qui au final – grâce à un sursaut populaire – ouvrait la voie à un gouvernement progressiste.

Elu secrétaire par la gauche de son parti pour cela, Pedro Sánchez avait un boulevard devant lui. Il a préféré s’entêter dans la voie solitaire que lui suggéraient les barons socialistes et le patronat. Objectifs: forcer le soutien sans contrepartie d’une gauche radicale en net recul ou obtenir l’appui des autoproclamés centristes de Ciudadanos. Ou encore, option encouragée par des sondages un temps euphoriques: convoquer de nouvelles élections, en faisant passer Unidas Podemos (UP) pour la responsable de l’échec de l’union de la gauche. Tout, en somme, sauf devoir partager le pouvoir avec un allié encombrant, car décidé à appliquer au minimum… le programme socialiste!

Avec constance, M. Sánchez a donc multiplié les obstacles: refus de négocier directement avec le patron d’UP, Pablo Iglesias, discussions concentrées sur les ultimes jours avant le vote d’investiture, vetos personnels, etc.

Sans doute, la stratégie de participation gouvernementale de Podemos était-elle discutable. Elle aura néanmoins mis en exergue l’incapacité chronique des socialistes à voir en l’autre gauche un partenaire à part entière. Une volonté d’avoir les mains libres qui va au-delà du vieux réflexe hégémonique: elle annonce l’abandon des mesures les plus fortes de leur plateforme électorale, telles que l’abrogation des lois sur le travail et l’éducation de M. Rajoy.

Alors qu’une nouvelle récession se profile à l’horizon 2020 et, avec elle, des pressions de Bruxelles, les socialistes auraient aimé compromettre la gauche radicale par son soutien parlementaire sans être tenus de résister. Ils sont désormais condamnés à trouver une hypothétique majorité absolue dans les urnes. Ou laisser tout ou partie du pouvoir à la droite. Un gâchis.

International Benito Perez Espagne

Connexion