Édito

Si vite?

Si vite?
Le 19 mai dernier, les Genevois ont accepté la réforme de la fiscalité des entreprises et de l’AVS. JPDS
Budget

Ça en a le goût et l’odeur, le Parti libéral-radical genevois a dévoilé mercredi, à la veille de la présentation du projet de budget 2020 du canton du bout du lac, deux textes de loi qui sont en fait un frein au déficit qui ne dit pas clairement son nom. Ceci nonobstant les mesures acceptées pour permettre aux caisses publiques genevoises d’absorber le manque à gagner lié à la RFFA (réforme de la fiscalité des entreprises et de l’AVS) et qui prévoyaient, effectivement, la possibilité de creuser pendant quelques années les déficits.

Oh, pour l’heure, ce retournement de veste est enrobé dans une novlangue libérale que ne renierait pas un perroquet, tant on est dans le bégaiement idéologique: ne pas faire porter sur les générations futures les choix d’aujourd’hui, imposer une vertu budgétaire à un Conseil d’Etat qui se goberge, etc. Bref, le PLR invoque le principe de responsabilité. Or, cette revendication est pour le moins abusive. C’est bien dans ses cuisines que l’on a concocté la soupe à la grimace qui a permis de vider les caisses de l’Etat pour le plus grand bénéfice des Genevois fortunés. En l’espace de vingt ans, ce sont environ 1 milliard de francs par année qui ont été coupés dans les revenus de l’Etat via différents cadeaux fiscaux bénéficiant prioritairement aux plus nantis. Dans un proche avenir, la RFFA creusera encore ce manco de quelque 400 millions de francs par an.

La manœuvre est cousue de fil blanc. Contrairement aux affirmations du parti des banquiers, encore réitérées mercredi, c’est bien une crise de recettes qui a été créée et entretenue. Ceci pour pouvoir invoquer un train de vie dispendieux de l’Etat et mieux couper dans les prestations ou privatiser celles susceptibles d’être rentables pour des actionnaires privés. Tout cela était connu et écrit avant le vote sur la RFFA. Y compris les écueils budgétaires à venir que les élus PLR font semblant aujourd’hui de découvrir, comme la recapitalisation de la caisse de pension de la fonction publique. Mais, chut, il fallait l’emporter face aux référendaires. On est juste un peu surpris du cynisme et de la rapidité avec laquelle, une fois le résultat engrangé, le parti de la finance renie ses engagements politiques et retourne à ses fondamentaux.

Le pire étant que cela ne semble même pas servir de leçon aux élus de gauche dans l’exécutif genevois qui ont porté la réforme fiscale. L’effet du syndrome de Stockholm, ou les effluves de l’opium libéral? Ces derniers pleurnicheront un peu pour la forme. Mais iront-ils jusqu’à s’excuser pour leur si discutable rôle dans ce processus qui a abouti à un vote désastreux en terme de justice fiscale?

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