Édito

Salvini et l’argent russe

Salvini et l'argent russe
Admirateur de Vladimir Poutine, le patron de la Lega, Matteo Salvini, est également hostile aux sanctions européennes imposées à la Russie après l'annexion de la Crimée. KEYSTONE
Italie

«Je n’ai jamais pris un rouble, un euro, un dollar ou un litre de vodka de financement de la Russie», s’est défendu la semaine dernière Matteo Salvini, patron du parti d’extrême droite Lega et homme fort du gouvernement italien. Le ministre de l’Intérieur et vice-président du Conseil est éclaboussé par une affaire impliquant des proches du Kremlin, qui auraient proposé un stratagème pour soutenir son parti. On parle de quelque 65 millions de dollars possiblement prélevés lors d’une transaction d’hydrocarbure à destination de la compagnie italienne ENI, par le biais d’intermédiaires.

Au cœur de la tempête se trouve un proche de Salvini, Gianluca Savoini, à la tête de l’association Lombardie-Russie. Comme l’avait révélé L’Espresso en début d’année, l’ancien journaliste était à Moscou en octobre dernier, en compagnie de deux compatriotes, notamment pour discuter d’un accord avec trois intermédiaires russes. A l’époque du scoop, Savoini avait décrit l’affaire comme «le scénario d’une fiction».

Or la semaine dernière, le site étasunien BuzzFeed révélait l’enregistrement de cette rencontre à l’Hôtel Metropol, d’où il ressort clairement que l’argent devait servir à la Lega pour les Européennes de mai. On ne sait pas si le parti a effectivement encaissé le pactole, mais avec 33% des voix aux élections, la Lega a quoi qu’il en soit réussi à doubler son score des législatives italiennes de 2018.

Même si elle ne touche pas directe-ment Matteo Salvini, grand pourfendeur des sanctions européennes à l’encontre de la Russie, l’affaire le place dans une posture délicate. Tout comme le président du Conseil italien, Giuseppe Conte, alors que Gianluca Savoini figurait début juillet parmi les invités d’un dîner officiel donné en l’honneur de Vladimir Poutine – Conte assure ne pas connaître le Lombard, désormais sous enquête pour corruption internationale.

Quant au Mouvement 5 étoiles (M5S), allié de la Lega au gouvernement, il appelle à la mise sur pied d’une commission d’enquête sur le financement des partis, mais sans critiquer ouvertement Salvini ou la Lega. Peu de chances d’ailleurs que le ton monte sensiblement avant le 20 juillet, lors-que se refermera une «fenêtre» rendant possible des élections anticipées en automne, en cas de chute du gouvernement – Salvini ne cesse d’agiter le spectre d’une implosion. Alors qu’il craint un score déplorable dans les urnes, le parti antisystème de Beppe Grillo démontre une nouvelle fois les limites de son discours de probité et de transparence.

Régions Opinions Édito Samuel Schellenberg Italie

Connexion