Proches-aidants: les trop timides propositions du Conseil fédéral
Avec sa loi fédérale sur l’amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches, le Conseil fédéral propose des améliorations dont le besoin se faisait cruellement sentir. De fait, ce sont souvent des proches, dans la majorité des cas des femmes, qui prennent en charge des membres de la famille dépendants de soins et/ou âgés. La revendication de l’Union syndicale suisse (USS), selon laquelle les services de soins et de prise en charge en cas de besoin doivent être abordables pour tout le monde et de qualité, n’est de loin pas encore devenue réalité. Dans ce domaine, les pouvoirs publics doivent assumer une bien plus grande responsabilité. Souvent, ce sont des belles-filles, des compagnes, des sœurs qui viennent à la rescousse lorsque qu’un-e de leurs proches a besoin de soins ou d’être pris en charge ; et cela, trop souvent au détriment de leurs propres revenus professionnels. Ces personnes ont de toute urgence besoin d’être aidées afin que leur engagement ne porte pas atteinte à leur santé et n’entraîne pas, pour elles-mêmes, des conséquences financières fâcheuses.
Le Conseil fédéral a transmis au parlement le projet de loi, qui est accueilli favorablement par la majorité des participants à la consultation. Concrètement, il propose que non seulement les parents d’enfants mineurs, mais aussi tous les travailleurs et travailleuses aient le droit, si un-e proche est malade, de quitter rapidement leur travail sans devoir renoncer à leur salaire. Mais les trois jours par cas prévus par le Conseil fédéral ne sont pas suffisants. Et la limite maximale de dix jours par an est l’expression d’une soumission inutile face aux organisations patronales qui avaient refusé le projet lors de la consultation.
Le Conseil fédéral veut aussi que les parents d’enfants gravement malades ou accidentés puissent prendre un congé payé de quatorze semaines au plus. Cette mesure soulagera grandement la situation des familles concernées, même si quatorze semaines ne suffiront pas dans de nombreux cas. L’USS salue aussi le fait que ce congé pourra être pris sous forme de jours séparés, comme suggéré lors de la consultation. Cette manière souple de procéder permettra aux parents de mieux répartir les jours de congé sur le délai-cadre – trop court – de dix-huit mois. En revanche, il est choquant que la protection contre le licenciement ne dure que six mois, et non les dix-huit mois du délai-cadre. Il est urgent de corriger cela. En outre, le Conseil fédéral renonce malheureusement à prévoir des congés de longue durée pour la prise en charge de proches adultes. Ainsi, des travailleurs et travailleuses en fin de carrière continueront de se voir poussés à quitter plus tôt la vie professionnelle parce qu’ils doivent assumer la responsabilité de leurs parents âgés.
La troisième amélioration sur laquelle le parlement va se prononcer concerne les bonifications pour tâches d’assistances de l’AVS. A l’avenir, une personne qui s’occupe de proches au bénéfice d’une allocation pour impotence faible (avant: moyenne) y aura également droit. Ce droit sera étendu aux concubins, le critère de conjoint ou de parenté n’étant plus appliqué. Il s’agit là d’un pas important vers une diminution du risque de pauvreté de proches aidants. On ne comprend par contre pas pourquoi le Conseil fédéral n’a pas repris les améliorations proposées par l’USS lors de la consultation: renoncer à mettre sur pied d’égalité le partenariat enregistré et le mariage est sans rapport avec la réalité sociale; ce point doit absolument être corrigé. Et la définition du partenariat de vie en tant que ménage commun existant depuis au moins cinq ans est par trop rigide. L’USS est d’avis que deux années et/ou un enfant en commun suffisent largement pour attester de l’existence d’un partenariat de vie.
L’USS appelle les Chambres fédérales à rapidement adopter ces améliorations importantes et à procéder aux corrections du projet du Conseil fédéral qui s’imposent. Les personnes qui prennent en charge le bien-être d’autrui méritent que l’Etat et la société assument aussi la responsabilité de leur bien-être. Il appartient aux politiques de mettre cela en œuvre.
L’auteure est secrétaire centrale de l’Union syndicale suisse.