Vaud

La démesure comme credo

La démesure comme crédo
Le maître-mot de la Fête des vignerons: donner de l’émotion. KEYSTONE
Fête des vignerons

Dans huit jours, Vevey vibrera au rythme de la Fête des vignerons. L’événement qui se veut traditionnel et populaire célèbre une fois par génération le travail de la vigne, avec un spectacle joué sur trois semaines dans une arène de 20’000 places.

Le maître-mot: donner de l’émotion. Les ingrédients: le tessinois Daniele Finzi Pasca comme metteur en scène et une arène colossale, avec ses cinq scènes, sa sono dernier cri, son plancher en led et ses pans qui se soulèvent pour laisser entrer les figurants. La folie des grandeurs coûte 100 millions de francs aux organisateurs qui se sont assurés du soutien d’une vingtaine de sponsors, dont notamment Nestlé, Securitas et Swiss en tête de peloton.

Le goût de la démesure fait partie de l’ADN de la Fête des vignerons. Il y a plus de 150 ans, l’arène comptait déjà 10’000 place (1865). En 1955, elle accueillait 16 000 spectateurs par représentation. Reste que le budget de cette année a doublé par rapport à la dernière édition de 1999. Génération après génération, il y a de quoi s’interroger: la Fête des vignerons est-elle populaire et rassembleuse? Ou creuse-t-elle le fossé entre une élite qui peut se permettre d’y participer et les autres? Rappelons que la fête est orchestrée par la Confrérie des vignerons, organisation patronale – ouverte aux femmes depuis 2008 –, qui a pour but de noter le travail des vignerons-tâcherons.

Les organisateurs aiment à répéter qu’au début des années 1800, le coût du billet correspondait au chauffage d’un appartement veveysan pendant tout l’hiver. A ce prix, il était déjà réservé à une élite. Aujourd’hui, est-il plus accessible? Une famille de quatre personnes débourse entre 320 et 1440 francs pour assister à l’une des vingt représentations.

Certains Veveysans ne trouvent plus leur place dans la métamorphose de leur ville, dont chaque mètre carré d’espace public du centre est investi par des restaurants, bars et autres stands. Aussi gigantesque, la fête ne peut être que commerciale. Et pour vendre les 300’000 billets, les organisateurs ratissent large. En témoignent des avions de Swiss transformés en supports géants de promotion, entièrement repeints aux couleurs de la fête.

Pour autant, à la déception des uns répond l’enthousiasme des figurants, qui gonfle à l’approche de l’événement. Ils sont 6000 quidams de la région, tous bénévoles, à faire vivre le spectacle. Depuis des mois, ils s’y consacrent entièrement, avec parfois des répétitions de plus de dix heures hebdomadaires, certaines en plein soleil sous une canicule étouffante. Ne reste plus qu’à ce que leur enthousiasme se propage au rythme du vin écoulé dans les caveaux.

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