Suisse

Du riz bio pousse au Tessin

La céréale est cultivée à sec à 210 mètres d’altitude. Un travail de fourmi.
Du riz bio pousse au Tessin
Le premier riz biologique certifié suisse est cultivé dans la plaine de Magadino. DR
Agriculture

Un champ de 25’000 m2 vert pomme situé à 210 mètres au-dessus du niveau de la mer: rien à voir avec l’image d’une rizière immergée sous l’eau. Çà et là, des travailleurs en bottes de caoutchouc, gantés et torse nu, manient la bêche sous 35°C. Ils passent les plants de quelque 20 cm de hauteur au peigne fin pour en arracher les mauvaises herbes.

C’est sur la plaine de Magadino, la zone la plus basse et la plus chaude de Suisse, non loin de Locarno, qu’est né le premier riz biologique certifié suisse. Une initiative commune de Settemaggio Fratelli Marcionetti et de la famille Aerni, deux entreprises locales. La première est connue pour ses vins, la seconde pour sa viande.

Culture à sec

«Ici, il est impossible d’inonder le terrain. La terre est trop drainante», explique Nicola Marcionetti, directeur de Settemaggio. Avec son frère Raffaele, caviste de formation, et leur père Isidoro, agronome retraité, il a donc adopté une méthode de culture à sec, qui nécessite beaucoup moins d’eau.

«En Suisse, le consommateur est prêt à payer le prix pour un produit de niche» Nicola Marcionetti

Depuis huit ans, toutes leurs cultures (carottes, pommes de terre, soja, céréales…) bénéficient du label Bio Suisse, à l’exception de la viticulture. «L’idée du riz bio nous est venue de l’Italie du Nord, connue pour sa riziculture. Les conditions ici sont proches de celles de la plaine du Pô», fait savoir l’agriculteur, ajoutant que depuis une dizaine d’années, quelques variétés de riz bio sont disponibles sur le marché italien.

Tenant compte du sol et du climat tessinois, des experts de la Péninsule ont recommandé aux Marcionetti quatre variétés de semences que les Tessinois ont cultivées pour la première fois l’an dernier sur 5000 m2. «Il importe que la plante soit résistante aux maladies et qu’elle pousse plus vite que les mauvaises herbes», souligne Nicola Marcionetti.

En chiffres

> 50cm > La hauteur des plants de riz au moment de la récolte

> 400 heures > Le temps à consacrer pour désherber 10’000m2

> 10 francs > Le prix minimal pour un kilo de riz biologique suisse

A cause d’un champignon, les récoltes de trois des quatre variétés de riz ont été presque totalement perdues, et la quatrième n’a pas complètement abouti. «Les quelques tonnes recueillies se sont néanmoins vendues comme des petits pains, avec un retour très positif, au-delà de nos attentes.»

Fin mai dernier, le riz a été planté une seconde fois, avec encore une nouvelle variété – toujours suggérée par les spécialistes italiens – pour faire le risotto. «Nous avons pris un risque important, dans la mesure où les résultats sont imprévisibles», admet Nicola Marcionetti. Le riz, qui a une croissance très lente, a été semé tard, ce qui lui permet de se développer très vite, le terrain étant déjà chaud.

Récolte à l’automne

L’agriculteur prévoit que la récolte se fera vers la fin octobre, lorsque les plants mesureront quelque 50 centimètres. Le riz sera ensuite séché, décortiqué et légèrement raffiné, probablement en collaboration avec une entreprise spécialisée italienne, sous la supervision des Marcionetti. Un travail de fourmi. Rien que pour désherber 10’000 m2, 400 heures de travail manuel sont exigées.

Comme le riz bio est tout nouveau en Suisse, il n’y a pas encore de produits naturels homologués en ce qui le concerne, relève le Tessinois. «Si nécessaire, il faudra probablement demander des dérogations spéciales pour utiliser une algue ou des extraits d’herbes afin de stimuler la croissance du riz, ou pour chasser les mauvaises herbes et les parasites.»

Vendu en Suisse

La commercialisation se fera exclusivement en Suisse. L’exportation est d’emblée exclue; le prix envisagé atteindra au moins 10 francs le kilo. «Les consommateurs suisses sont prêts à payer le prix pour un produit de niche, unique, dont un label garantit le caractère biologique.» LA LIBERTÉ

Suisse Andrée-marie Dussault Agriculture BIO

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