Médaille en chocolat amère
Ils l’aiment leur Métropole horlogère, les Chauxois. Ils en sont fiers, comme s’ils l’avaient façonnée de leurs mains. Au premier visiteur croisé, ils ne manqueront pas de lui rappeler que La Chaux-de-Fonds est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco. Ils trouvent que la distribution de ses rues lui donne des airs de New York. Ils vantent sa vie culturelle, son ensoleillement, son statut de Mecque de l’horlogerie. Et affirment, avec un soupçon de mauvaise foi, qu’elle est la ville la plus haute de Suisse. Surtout, ils rappellent à qui veut l’entendre qu’elle est, en termes de population, la troisième ville de Suisse romande.
Une affirmation qu’ils devront désormais conjuguer au passé. Les chiffres du recensement neuchâtelois, publiés jeudi, lui ont fait perdre son titre symbolique au profit de Fribourg. Si le canton de Neuchâtel se dépeuple et a perdu 1142 habitants en 2018 – alors que la population du pays continue de croître –, La Chaux-de-Fonds en paie le tribut le plus lourd. Avec 692 âmes en moins, la ville assume à elle seule plus de 60% de la chute démographique.
Alors certes, un peu plus de la moitié des personnes sont retournées dans leur pays d’origine, surtout le Portugal. Mais 308 Suisses (près de 1% de la population) se sont exilés, principalement dans les communes bernoises et fribourgeoises voisines. Triste constat, explicable en partie par le traditionnel facteur de la crise économique que les Montagnes neuchâteloises ont connue, notamment dans le domaine de l’horlogerie.
Pourtant, l’économie chaux-de-fonnière se porte mieux, le chômage est à la baisse et l’offre de logement s’améliore. Des atouts qui auraient de quoi attirer de nouveaux habitants. Mais très souvent, les nouveaux travailleurs de La Chaux-de-Fonds choisissent de penduler.
Et pourquoi leur donnerait-on tort? La ville a subi de plein de fouet les mesures d’austérité menées par le canton depuis plusieurs années. Elle a vu ses prestations culturelles, sociales et même son hôpital réduits à une portion congrue. Il fait tout simplement moins bon vivre à la Tchaux.
Ces décisions, subies comme des attaques du Bas, créent un sentiment d’assiégés, illustration des fissures qui lézardent la cohésion du canton. Inverser cette tendance, redonner à cette ville tout son lustre, demandera nécessairement la mobilisation et la solidarité de tout le canton. Une donne que le Conseil d’Etat semble avoir du mal à intégrer.