On nous écrit

Un moindre mal

Heidi Seray rappelle que dans une république laïque, la loi civile prime sur la loi religieuse.
Votations

J’aimerais d’abord dire que je regrette qu’il ait été nécessaire de légiférer en la matière. Malheureusement, le flou du texte constitutionnel et la situation actuelle qui se caractérise par un retour en force du prosélytisme religieux ont rendu l’exercice indispensable. Et nous voilà en présence d’une loi qui ne satisfait pleinement personne, mais qu’il faut pourtant accepter comme un moindre mal.

En effet, s’agissant d’abord de l’interdiction faite aux employé(e)s de l’Etat de porter des signes religieux ostentatoires dans l’exercice de leurs fonctions, elle me semble aller de soi. Nous sommes dans une République qui se veut laïque; les personnes en question n’ont pas à se signaler par leur appartenance religieuse. Je n’ai ni be-soin ni envie de connaître la religion de mes interlocuteurs. Et franchement, je déteste l’idée qu’en me rendant dans un service de l’Etat, la personne au guichet ou dans le bureau me signifie «je suis musulmane, juive, évangélique, sikh, etc.» avant même de me dire bonjour.

Mais bien plus fondamentale encore apparaît la question des élus. Encore une fois, nous sommes un Etat démocratique laïque. La démocratie, ce ne sont pas que des élections. Ce sont aussi des valeurs, des principes. Et le principe fondateur d’une république laïque est tout de même la primauté absolue de la loi civile sur la loi religieuse quelle qu’elle soit. Or, lorsqu’une élue déclare qu’elle serait obligée de renoncer à son mandat si elle était obligée de laisser son voile au vestiaire durant les séances, elle affirme haut et fort l’exact contraire, à savoir que pour elle la loi religieuse prime sur la loi civile. Aux bonnes âmes qui comparent cette interdiction à celles ayant frappé les communistes dans les années trente, et d’autres comparaisons tout aussi boiteuses, je précise que personne n’a encore dit que les musulman(e)s n’étaient pas éligibles ou n’avaient pas le droit de siéger dans un parlement. La loi demande simplement qu’ils siègent sans agiter un étendard politico-religieux. Donc, sans enthousiasme, mais avec conviction, je voterai oui à la loi sur la laïcité.

Heidi Seray, Genève

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