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Rien de nouveau sous la coupole

Rien de nouveau sous la coupole
Viola Amherd et Karin Keller-Sutter partagent leur joie lors de leur prestation de serment. KEYSTONE
Politique suisse

La bonne nouvelle du jour, c’est que deux femmes ont été élues dès le premier tour – fait rare – et vont participer à un nécessaire rééquilibrage des genres au Conseil fédéral. Sinon, circulez, il n’y a pas grand-chose à voir. C’est plutôt une stabilité certaine qui s’est manifestée lors de ce vote à Berne.

La démocrate-chrétienne Viola Amherd se dit de centre-droit et succède à Doris Leuthard. Difficile pour l’heure d’y voir un quelconque glissement. La magistrate sur le départ avait déboulé dans l’exécutif fédéral en portant les habits d’une pronucléaire; c’est pourtant elle qui a négocié la sortie de l’atome… Il faudra voir à l’usage.

Karin Keller-Sutter fait partie de la droite musclée du Parti libéral-radical (PLR). Là aussi, «qui vivra verra». Le vrai glissement à droite a déjà eu lieu avec le remplacement de Didier Burkhalter – qui n’avait pas molli sur certains principes – par un Ignazio Cassis plus sensible aux attentions des lobbies.

En 2010, Mme Keller-Sutter avait été retoquée car jugée trop dame de fer. Depuis, elle a soi-disant mis de l’eau dans son vin néolibéral. Mais l’exemple qu’on nous cite est sa participation au douteux compromis sur la RFFA (Réforme de la fiscalité des entreprises et du financement de l’AVS). La preuve par l’acte reste à faire.

Cette soif de stabilité du parlement qui appelle de ses vœux un Conseil fédéral à même de réaliser des arbitrages masque en fait un glissement de certaines lignes de crête idéologiques. Le triomphe néolibéral avec son creusement des inégalités et sa sape de l’Etat a mis en crise les grands partis historiques au niveau européen, voire outre-Atlantique.

En France, le PS a implosé et les Républicains se sont fait manger la laine sur le dos par Emmanuel Macron. Avec, à l’arrivée, l’actuel embrasement. En Allemagne, le système est en crise. Ne parlons même pas du Brexit, de la comète Trump ou de l’émergence d’une extrême droite nouvelle et qui parvient à peser dans des pays que l’on croyait vaccinés du fait de leur histoire douloureuse.

Le vote de l’Assemblée fédérale reflète sans doute une volonté de stabilité institutionnelle dans ce monde mouvant. Mais cela ne sera pas suffisant. Les échéances qui attendent la Suisse sont connues: l’Union européenne exige des concessions de taille, inacceptables pour certains. Tout dépend de ce qui sera cédé: tant mieux si cela marginalise la droite populiste qui en fait son miel; tant pis – et c’est tout de même une option plus plausible – si ce sont les droits des travailleuses et des travailleurs qui sont sacrifiés.

Ces échéances politiques et idéologiques ne pourront pas être contournées. Et c’est au parlement que tout se jouera en priorité. Les élections en 2019 serviront de test partiel seulement, vu l’inertie qui prévaut en politique. Plus significatives seront certaines votations à fort contenu politique. Par exemple le référendum contre la RFFA, s’il devait aboutir…

Opinions Philippe Bach Politique suisse Conseil fédéral

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