Édito

L’école a failli à son devoir

L’école a failli à son devoir
Par leurs propos, les conseillers d'Etat Anne Emery-Torracinta et Antonio Hodgers (au centre) ont montré qu'ils ont finalement pris la mesure du tort subi par les jeunes femmes. CÉDRIC VINCENSINI
Abus sexuels

L’école genevoise n’est pas parvenue à protéger ses élèves. Trente ans durant, des enseignants prédateurs sont parvenus à jouer de leur influence dans des établissements du canton sans encourir de risque, alors que l’existence de comportements déviants était connue. Telle est la conclusion politique du rapport sur l’attitude du Département de l’instruction publique envers les soupçons d’abus sexuels subis par des élèves entre 1984 et 2014. Surtout dédiée à l’affaire Tariq Ramadan, l’analyse de deux anciens juges aborde également des cas plus récents.

Et manquements il y a eu. Pour autant, précise le rapport, on ne peut parler de «dysfonctionnement» sur le plan administratif. Car aucun règlement ne stipule noir sur blanc que les relations sexuelles entre profs et élèves sont à bannir et seule une plainte déposée par les victimes aurait permis de faire bouger les choses. L’urgence politique est donc d’énoncer des directives pour y remédier.

La notion de consentement a certes beaucoup progressé depuis la vague #metoo – quoique des efforts restent à faire. Mais, même selon les standards des années 1980, les auteurs admettent des cas où la rigueur et le bon sens ont manqué. Comme lorsqu’un tiers a rapporté à une doyenne du collège de Saussure que sa petite amie avait des relations sexuelles avec Tariq Ramadan: le mot a circulé jusqu’au directeur et s’est soldé par une convocation et le conseil de ne pas rester seul avec un ou une élève.

Au moins, la prise de conscience politique n’est pas feinte. Mercredi, les propos des conseillers d’Etat Antonio Hodgers et Anne Emery-Torracinta montraient qu’ils ont finalement pris la mesure du tort subi par les jeunes femmes, abandonnées par le système scolaire et livrées à elles-mêmes. Par leur courage, qui les a menées à parler aux médias, elles ont poussé les institutions à se saisir du cas. Si, à l’avenir, plus personne n’est autorisé à fermer les yeux au sein de l’école genevoise, ce sera en bonne partie grâce à elles.

Opinions Régions Édito Genève Laura Drompt Abus sexuels

Autour de l'article

Connexion