Rester vigilant
Après un certain recentrage du parlement genevois il y a trois semaines, le gouvernement cantonal est désormais lui aussi plus à gauche, ou plus au centre, ou moins à droite, selon la grille de lecture que chacun applique. Car si l’Entente bourgeoise perd sa majorité, le MCG Mauro Poggia – certes un électron libre – reste, sur nombre d’enjeux fondamentaux, un homme ancré à droite.
En plaçant un troisième magistrat dans l’exécutif en la personne du socialiste Thierry Apothéloz, Verts et PS espèrent que le gouvernement pourra mieux tenir compte des aspirations progressistes en présentant des solutions plus centristes. Avec ce rapport de force rééquilibré au Conseil d’Etat et au Grand Conseil, Genève est en quelque sorte obligé de trouver des consensus, entend-on de la part des partis gouvernementaux.
Toute la question sera de savoir à quel point le consensus sera ou non acceptable. A propos du nerf de la guerre, soit la fiscalité dont dépendent toutes les politiques publiques, l’inquiétude est de mise. Car durant l’entre-deux-tours, le trio de gauche élu ce dimanche a montré sur la réforme de l’imposition des entreprises (PF17) qu’il était non seulement en désaccord avec la gauche de la gauche, mais aussi avec ses propres formations, le Parti socialiste et les Verts! Car derrière la promesse d’une défense sans conditions des prestations publiques, ces magistrats se sont dits prêts à accepter des trous de centaines de millions de francs venant gonfler la dette publique, en comptant sur une ultérieure relance économique consécutive à la baisse d’impôt pour les entreprises. Un discours qui sonne libéral…
Au final, la direction que prendra ce gouvernement dépendra beaucoup des majorités qui pourront se former au Grand Conseil. En cela, le premier test sera celui du budget 2019.
Des dossiers d’envergure devront trouver des solutions et mériteront la plus grande vigilance de la part des électeurs de gauche. Ils ne devront pas hésiter à demander des comptes à leurs représentants en cas de dérive consensuelle: on songe donc à PF17, bien sûr, mais aussi à la réforme des retraites, ou encore celle de la grille salariale de l’Etat.
Si la gauche gouvernementale devait se montrer flanchante ou être minorisée, le combat devra se prolonger dans la rue et par référendum.
Quant à la défaite de Luc Barthassat, est-elle due à la personne, à son bilan, ou aux deux? Plutôt que de spéculer sur les motivations des électeurs, constatons les limites d’une politique de mobilité cherchant à satisfaire tous les modes de transport, dans un canton et à un moment où la mobilité douce et les transports publics devraient être partout privilégiés.