Édito

Un combat inachevé

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Martin Luther King à Atlanta. (AP File Photo)
États-Unis

Le 4 avril, les Etats-Unis ont célébré la mémoire de Martin Luther King, assassiné par balle cinquante ans auparavant. Politiciens de tout bord ont salué le héros de la fin de la ségrégation raciale.

Ce même jour, à New York, des policiers ont abattu un Noir qui tenait un tuyau à la main – ils ont pris l’objet pour une arme, affirment-ils. Cette nouvelle bavure contre un Afro-Américain s’ajoute à une longue liste et illustre comment, un demi-siècle après la mort du célèbre pasteur, la plupart de ses combats sont loin d’être gagnés. «Nous ne serons jamais satisfaits aussi longtemps que le Noir sera la victime des indicibles horreurs de la brutalité policière», déclarait en effet Martin Luther King lors de son célèbre discours «I have a dream», prononcé en 1963 à Washington devant 250 000 personnes.

A l’image de sa bataille contre les abus des forces de sécurité, ses luttes sociales – contre le chômage, la pauvreté, l’exclusion de toutes les minorités – et contre l’interventionnisme militaire étasunien (au Vietnam à l’époque) restent d’actualité.

L’accession à la Maison-Blanche de Barack Obama a beau avoir été présentée comme l’avènement d’une nation post-raciale, la réalité est tout autre. On a même assisté au cours de sa présidence au creusement des inégalités (emploi, revenus, traitement judiciaire), à une multiplication de bavures policières et à un retour en force de groupes racistes. Tout ce que Martin Luther King combattait.

Le pouvoir étasunien n’a pas manqué d’occulter ces dernières décennies la dimension politique et sociale du combat de King, pour mieux récupérer son image. Alors qu’il était considéré comme un dangereux agitateur extrémiste dans les années 1960, on célèbre un Martin Luther King Day depuis 1983. Une image de patriote qui a aidé à la construction d’une nation égalitaire a alors été façonnée. Pour mieux taire ses luttes contre le système libéral. Et pour dire aux Noirs: Vous avez eu les droits civiques que vous réclamiez. Arrêtez de vous plaindre!

Un discours bien assimilé par la majorité blanche, qui pense que les inégalités ont nettement diminué, comme le relève un récent sondage. Mais beaucoup moins par les Noirs, qui sont nombreux à en souffrir encore au quotidien. Un clivage également illustré par les violentes attaques d’une bonne partie du pouvoir blanc contre le mouvement Black Lives Matter ou la mobilisation des sportifs noirs contre les violences policières, qui ont récupéré le flambeau de la lutte contre les discriminations.

Opinions Édito Gustavo Kuhn États-Unis

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