Édito

Aveuglement volontaire

Le directeur de la BGE licencié 1
Sami Kanaan. JPDS
Ville de Genève

«Il sera (…) nécessaire d’examiner les actions à réaliser en matière de ressources humaines, sans exclure une éventuelle remise en cause des rapports de travail avec les personnes concernées.» Le message – plutôt inédit – de la Cour des comptes à l’adresse des autorités de la Ville de Genève ne sera pas resté lettre morte longtemps. Vendredi, le chef de la Culture, Sami Kanaan, a annoncé la suspension immédiate du directeur de la Bibliothèque de Genève. Le Conseil administratif pouvait-il agir autrement après le rapport autant sévère que sérieux de l’organe indépendant de contrôle des institutions publiques?

Ce directeur a été engagé il y a plus de cinq ans pour moderniser la bibliothèque scientifique, répartie sur quatre sites et dont le siège principal est à Uni Bastions. Aujourd’hui, le constat est amer: le navire tangue dangereusement même s’il va dans la bonne direction. En clair, l’ouverture accrue aux publics et l’adaptation aux évolutions technologiques ne sont pas au rendez-vous, faute d’avoir su accompagner ces changements. Cela a créé de graves tensions et souffrances au travail. En cause, également, la personnalité du directeur, jugé autoritaire et cassant par un grand nombre d’employés. Il y a un an, Le Courrier révélait ce climat délétère. Nous titrions notre enquête «La peur règne. On se sent abandonnés.»

Face à ce cri du cœur venu de l’intérieur, Sami Kanaan s’était contenté d’un SMS pour affirmer que la situation était «globalement bonne» à la BGE. Circulez, il n’y a rien à voir! Le Conseil municipal avait eu droit à une réponse similaire. Le directeur, lui, avait refusé de nous répondre, tout en regrettant qu’un article soit fondé sur de vieilles rumeurs relayées par deux-trois personnes… Vraiment? La Cour a auditionné 75 employés sur 103 et 54 ont déploré son comportement inapproprié!

Il fallait être aveugle ou ne pas vouloir voir pour passer à côté d’un tel désaveu! Des tensions «ne sont pas anormales» quand des changements sont opérés, avait déclaré le magistrat au Conseil municipal. Des formateurs de la Haute école de gestion avaient pourtant loué l’ouverture des bibliothécaires aux changements, pour peu que l’accompagnement soit adapté. Quelle légèreté coupable de la part du chef de la Culture – et par ricochet de l’ensemble du Conseil administratif! Il est incompréhensible d’avoir si longtemps conservé la confiance dans ce haut cadre, contre vents et marées et au prix de graves souffrances au travail! Aux politiques, maintenant, de demander des comptes, même si les priorités sont désormais de rétablir un climat serein et la reprise des négociations sur le transfert de la BGE au canton.

 

Le directeur de la BGE licencié

vendredi 26 janvier 2018 Rachad Armanios
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