Des comptes justes, à un milliard près
Un excédent de 800 millions de francs au lieu d’un déficit de 250 millions. Selon les dernières estimations des comptes 2017 de la Confédération, il devrait ainsi y avoir un écart de plus d’un milliard de francs entre le budget et le résultat à la fin de l’année. Une paille !
En réalité, il n’y a pas de quoi être bien étonné. Depuis 2006, le parlement sous-évalue systématiquement les recettes à venir, pour aboutir à une différence de 1,2 milliard de francs en moyenne. La technique est connue: le camp bourgeois crie au loup, en annonçant de terribles pertes. Sous la menace du fameux «frein à l’endettement», on procède à des coupes drastiques dans le budget, conformément aux attentes des adeptes du «moins d’Etat». Une année plus tard – surprise! –, l’argent coule à flots. Reste à reprendre la boucle pour l’année suivante.
L’artifice a désormais été élevé au rang de méthode par le camp bourgeois. Rappelons que les 800 millions de recettes annoncés pour la fin de cette année se sont, entre autres, faits sur le dos des employés de la Confédération (avec par exemple 50 millions de coupes transversales dans le personnel) et de l’asile (294 millions pour l’aide sociale dans ce domaine). Ces chiffres donnent aujourd’hui raison à la gauche parlementaire, qui a tenté de refuser la cure d’amaigrissement en décembre dernier. On se souvient de l’UDC, qui aurait pour sa part préféré une «cure d’austérité» plus sévère et qui s’est finalement massivement abstenue.
Mais ces restrictions, imposées année après année, visent un autre objectif: préparer les comptes du pays à une réforme de l’imposition des entreprises, refusée le 12 février dernier et dont une nouvelle mouture devra être bientôt présentée. Le principe consiste à rogner tout ce qui peut l’être dans les finances publiques. Des économies qui permettent ensuite de revoir les impôts à la baisse en promettant que l’argent sera réinvesti dans l’économie par les privés et les entreprises. Un système qui a montré ses limites dans plusieurs cantons, à l’exemple du paradis fiscal lucernois obligé de fermer ses écoles durant une semaine pour compenser son budget déficitaire après plusieurs baisses d’impôts.
Après la publication des prévisions de la Confédération, le Parti socialiste appelait, hier, à ce que soient annulées «les coupes prévues pour 2018 au niveau du personnel, de la formation et de la coopération au développement». On ne peut qu’approuver, de même que l’appel à réformer le frein à l’endettement.