Pacifisme ou consensus
Le débat que le Parti socialiste suisse (PSS) va tenir ce samedi à l’occasion de son assemblée des délégués sera révélateur. Il est en effet proposé aux militants du parti à la rose d’adopter un papier de position ouvrant la porte à l’acquisition de nouveaux avions de combat.
Ce qui provoque bien sûr un tiraillement entre une tradition pacifiste et un courant se définissant comme «réaliste et pragmatique», pour qui l’option réduite à 30 nouveaux appareils de combat est déjà une victoire par rapport aux velléités de Guy Parmelin de dépenser 9 milliards de francs pour conserver une soixantaine d’appareils en état de voler.
Cela serait-il à même d’amadouer les partis bourgeois? Il est permis d’en douter. Ce printemps, un groupe d’experts proposait d’ailleurs des options impliquant des dépenses pour un montant double de celui proposé par le conseiller fédéral udéciste. Lorsqu’il est question d’armée, les contraintes budgétaires souvent brandies en d’autres circonstances ont tendance à être levées avec une facilité déconcertante.
Autre constante politique: la menace extérieure. Lors du débat sur l’achat du F/A-18, c’était la guerre en ex-Yougoslavie qui était agitée; gageons que la situation en Ukraine va revenir sur le tapis pour justifier l’achat des coûteux engins.
En revanche, la question fondamentale de l’utilité et de la nécessité réelle de ces dépenses risque, une nouvelle fois, d’être occultée. Le document du PSS met en avant la nécessité d’une «défense dans les trois dimensions», à savoir aussi verticalement, dans le ciel.
On peut toutefois s’interroger: aucun de nos voisins immédiats ne souhaite envahir la Suisse. Les risques réels sont à chercher ailleurs. Les attentats terroristes comme celui du 11-Septembre seraient plus à craindre. Et, oui, la Suisse a sur son territoire des cibles potentielles. Mais, même si le Palais fédéral ou le Palais des Nations étaient menacés, l’aviation suisse serait en peine d’agir vu le caractère exigu du territoire. Le temps qu’un avion pénètre dans l’espace aérien helvétique, il serait déjà trop tard pour réagir, pour autant qu’une action soit possible.
Le papier de position du PSS, pour consensuel qu’il soit, reste tourné vers une manière de penser héritée du passé. Il élude des questions autrement plus brûlantes, comme la hiérarchisation des priorités en matière de dépenses publiques, où certains – l’armée – sont plus égaux que d’autres – le social –, quand il s’agit d’arbitrer l’affectation des deniers publics.