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«Les cantons ont une marge de manœuvre»

Dans une lettre ouverte aux conseillers d’Etat vaudois, Marie-Pierre Maystre s’indigne de la séparation d’une famille de quatre enfants logeant au centre EVAM de Vennes, à Lausanne, dont des membres ont été soumis fin juillet à un renvoi forcé vers la France, en vertu des accords Dublin.
Asile

C’est avec indignation et colère que je viens d’apprendre le renvoi et la séparation, une fois de plus, d’une famille – la famille Hailu – et ce, dans des conditions indignes de tout pays qui se dit «démocratique» et respectueux des droits humains1 value="1">https://asile.ch/asile.ch/2017/07/27/collectif-r-vaud-separation-dune-famille-de-quatre-enfants-lors-dun-renvoi-force/. On se croirait dans un mauvais film de gangsters avec enlèvement de personnes durant la nuit ou dans une république bananière.

J’ai été psychothérapeute d’enfants, adolescents et adultes dans un service public, le Service médico-pédagogique (SMP) à Genève, retraitée depuis peu et suis grand-mère de deux petits-enfants. Je ne peux imaginer que l’on fasse la même chose avec ma belle-fille et ses enfants, les arracher à leur maison en pleine nuit, menotter la maman et laisser le père avec la fillette de 12 ans qui était dans un camp de vacances, donc absente. Quel traumatisme pour les enfants et la famille! Pourquoi une telle violence?

Pour se retrouver où? Apparemment cette famille n’a pas de liens en France, ni à Nice. Imaginez-vous deux minutes donner à vivre une telle situation à vos proches. Moi, jamais… je ne laisserais faire une telle chose.

Je suis profondément indignée d’autant que le règlement Dublin laisse une part d’humanité dans sa dureté, notamment pour les familles avec enfants. Une pétition citoyenne circule d’ailleurs pour le rappeler, à l’initiative notamment de Amnesty International2 value="2">www.amnesty.ch/fr/sur-amnesty/agenda/2017/petition-dublin.

Je suis d’autant plus offusquée que la Suisse, et Genève plus spécialement, abrite le HCR (Haut Commissariat pour les réfugiés) qui tend à réunir les familles et pourvoir à leur mieux-être. Tandis que nos cantons – vous en êtes la preuve aujourd’hui –, eux, font tout pour aggraver les situations déjà difficiles dans lesquelles vivent et tentent de se restaurer ces familles, en les séparant, les traitant comme des malfaiteurs.

J’ai honte devant de tels actes en tant que Suissesse et pour vous qui pouvez intervenir pour que cela ne se passe pas… ainsi. Les cantons ont une marge de manœuvre, ils peuvent refuser un renvoi qu’ils jugent inadéquat.

Je ne peux que vous supplier, pour espérer que le traumatisme encouru – un de plus sans doute – et les conséquences destructrices d’une telle procédure sur la santé psychique de tous les membres de cette famille et plus particulièrement des jeunes enfants qui n’ont pas les mots pour exprimer leur désarroi soient «allégés», d’œuvrer au retour de cette famille au complet en Suisse dans les plus brefs délais.

J’espère que ma missive retiendra toute l’attention qu’elle mérite dans un pays comme le nôtre où les mots «droits humains» et «respect» de ces droits devraient prendre sens.

Nous sommes au lendemain de notre fête nationale, moment où il fait bon se rappeler les valeurs sur lesquelles est fondée l’Helvétie.

 

Notes[+]

* Genève

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