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Une distribution élargie d’iode: parce que les centrales vieillissent

NUCLÉAIRE • Contrairement à la France, la Suisse reconnaît la dangerosité accrue des centrales nucléaires, constate le mouvement pour une sortie du nucléaire APAG2. Mais les mesures restent insuffisantes.

La Suisse vient d’élargir de 20 à 50 kilomètres la zone, autour des centrales nucléaires, dont les habitants recevront à leur domicile des pastilles d’iode stable. Ces pastilles sont destinées à saturer d’iode stable la thyroïde des personnes exposées à une contamination radiologique lors d’un accident dans une centrale nucléaire avec relâchement d’iode radioactif. Ce dernier, l’isotope I131, d’une période de 8 jours (c’est-à-dire dont la radioactivité diminue de moitié en 8 jours), est susceptible de provoquer, très rapidement après l’accident, de graves dommages, notamment d’induire un cancer, s’il se fixe dans la glande thyroïde, particulièrement dans celle des embryons, des enfants et des jeunes gens. A notre connaissance, rien n’est prévu concernant les animaux domestiques et le bétail.

Les autorités helvétiques justifient cette mesure par le retour d’expérience de la catastrophe de Fukushima. Mais cette mesure est aussi et surtout justifiée par le vieillissement des centrales nucléaires suisses qui figurent parmi les plus âgées à l’échelle mondiale. L’élargissement du périmètre de distribution d’iode stable fera passer la population concernée de 1,2 million à 4, 34 millions d’habitants, soit plus de la moitié de la population suisse. Par cette mesure, la Suisse reconnaît donc officiellement que le danger présenté par les cinq centrales nucléaires suisses est nettement plus important qu’estimé jusqu’ici.

Il est intéressant de relever que les autorités françaises n’ont, jusqu’ici, rien entrepris de tel. Seules les personnes habitant dans un rayon de 10 kilomètres autour des centrales nucléaires, ou des sites d’armes nucléaires, se voient encore offrir gratuitement des comprimés d’iode stable. Or, en tout cas dans la vallée du Rhône parsemée de centrales et d’autres installations nucléaires, il se justifierait d’instaurer un système tout autre, compte tenu aussi des vents du nord et du sud fréquents et prédominants.

Le Bureau de l’APAG2 prend acte de l’initiative suisse, mais la juge loin d’être adéquate et suffisante, compte tenu des autres radiotoxiques libérés lors des accidents nucléaires de Tchernobyl et Fukushima. Il invite les populations concernées à se mobiliser pour exiger de leurs autorités politiques des mesures adéquates pour conjurer sans délai le péril croissant de contamination radiologique accidentelle de leurs pays respectifs et des Etats voisins, du fait de la fragilisation des centrales nucléaires due à leur vieillissement.
 

* Association de l’Appel de Genève II (APAG2)

Opinions Agora Ivo Rens

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