Tensions sur le front de l’unité syndicale
Après un mois de mobilisation et près de deux semaines de grève, le Conseil d’Etat genevois a finalement accédé à l’essentiel des revendications des aides-soignant-e-s. Un résultat très positif rendu possible par l’engagement sans réserve du Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs (SIT), qui a suscité une forte dynamique de mobilisation, et par sa capacité à proposer des solutions concrètes pour les 1117 aides-soignant-e-s des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et des autres établissements. Avec ce mouvement inédit à Genève de par son ampleur et sa durée, le plus important qu’ait connu le monde soignant depuis des décennies, le SIT a démontré qu’il était possible de mener des grèves offensives, qui donnent en outre de vrais résultats, et sans que celles-là aient forcément besoin de durer trois mois…
• Jusqu’à 282 francs d’augmentation et une répartition plus juste. L’accord trouvé avec le Conseil d’Etat permet une revalorisation salariale substantielle de la fonction d’aides-soignant-e-s, avec ou sans diplôme. Tou-te-s les aides-soignant-e-s obtiennent une classe de plus. Mais grâce à l’intervention du SIT, le coulissement correspond à une augmentation salariale beaucoup plus importante d’au minimum 164francs mensuels (sur treize mois) et pouvant aller jusqu’à 282 francs. Cette solution permet de valoriser tout le personnel et autant, voire mieux, les personnes ayant beaucoup d’ancienneté que les jeunes engagé-e-s qui étaient favorisé-e-s par l’application du coulissement ordinaire. Celles et ceux qui touchent la prime gériatrie auront une augmentation un peu moindre, mais l’intégration à leur salaire d’une part de la prime est pour elles-eux un avantage non négligeable en termes de deuxième pilier et de sécurité du salaire.
• Elargissement dès 2013 aux autres aides-soignant-e-s. L’accord des HUG est élargi aux aides-soignant-e-s des autres établissements du canton (EMS, Services d’aide et de soins à domicile-FSASD, Etablissements pour personnes handicapées-EPH) dès 2013, après analyse paritaire de l’évolution de leur cahier des charges. Par ailleurs, est mis sur pied un groupe paritaire HUG chargé de proposer des formations certifiantes pour les aides-soignant-e-s. Le Conseil d’Etat s’engage enfin à ce que personne ne subisse de représailles du fait de sa participation à la grève. Dans une période particulièrement défavorable aux avancées sociales (crise économique mondiale, budget 2012 déficitaire, licenciements dans l’industrie suisse, etc.), c’est une véritable victoire qu’ont arraché les aides-soignant-e-s par leur lutte exemplaire.
• Bravo aux aides-soignant-e-s. Le SIT tient à féliciter toutes les aides-soignantes et les aides-soignants qui ont participé, d’une manière ou d’une autre, à cette lutte difficile. Il fallait du courage et de la détermination et ceux-là n’ont pas manqué. De plus, les grévistes ont su tout au long du mouvement conserver leur bonne humeur et se manifester dans la dignité. La colère réelle des aides-soignant-e-s n’a pas rimé avec injures et débordements. C’est tout à leur honneur.
• Le syndicalisme à la manière du SSP: une idéologie démagogique au pouvoir! En dépit de ces très bons résultats et de leur approbation enthousiaste par près de trois-quarts des quelque 200 grévistes, le Syndicat des services publics (SSP) a cru bon de se désolidariser du protocole d’accord – ce alors qu’il clame haut et fort que ce sont les Assemblées générales de grévistes qui sont décisionnaires! Si ce qu’il convient désormais d’appeler le Syndicat Sans Propositions a claqué la porte au moment de conclure le mouvement, c’est qu’il n’a pas supporté ne pas réussir à imposer son modèle de grève de longue durée dans lequel la grève vaut plus pour elle-même que pour les revendications des salarié-e-s. C’est également à cause de ce modèle, qui ne supporte pas la dialectique, que le SSP a lancé seul les autres mouvements dans les HUG et qu’il en a exclu le SIT quand celui-là, comme à l’EMS de Vessy, a cherché à rejoindre le mouvement. Ce syndicalisme de rupture fait peu de cas du principe fondamental d’unité et de pluralité d’action syndicale, confond fins et moyens, causes et effets et conduit inévitablement à la division et à la démotivation du personnel. La ligne actuelle du SSP est devenue, pour le syndicalisme, un danger à combattre!
* Secrétaire syndical, SIT.