IQOS, GLO, PLOOM, la nouvelle arnaque des cigarettiers
Heureusement, au XXIe siècle, le lien entre la fumée et les cancers des poumons, les maladies cardiovasculaires et d’autres maladies graves n’est plus franchement contesté. On peut se réjouir de l’efficacité des mesures de prévention du tabagisme ainsi que de la bonne acceptation depuis environ dix ans de l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Cet aspect de la prévention, outre le fait que cela protège le public et les employés des méfaits de la fumée passive (que les cigarettiers ont niés de manière éhontée, en payant même des scientifiques, dont un professeur associé à l’université de Genève, pour qu’ils produisent des publications minimisant l’impact de la fumée passive ou pour mettre en doute les études qui révélaient sa nocivité), influence la norme sociale (qui ose encore fumer à l’intérieur d’une maison?) et aide les fumeurs à arrêter de fumer en rendant le tabagisme moins accessible. L’impact sur la santé commence à se faire voir et, selon une étude récente, par exemple, le nombre d’hospitalisations à Genève pour des affections respiratoires a diminué de près de 20% – et ce n’est pas la pollution atmosphérique qui a baissé ces dix dernières années!
Bien qu’il reste encore 1 milliard de fumeurs sur la planète, le nombre d’adeptes de la cigarette baisse chaque année, de l’ordre de 2% à 3%. La diminution du nombre de fumeurs est beaucoup plus importante en Europe. Ainsi, en France, la vente de cigarettes a diminué de 45% depuis le début de ce siècle.
Ces informations réjouissent les professionnels de la santé et les encouragent à continuer à favoriser l’arrêt du tabac par leurs conseils et prescriptions. Dans ma pratique professionnelle, il ne se passe pas une semaine sans que je ne dise à un père ou à une mère combien c’est important pour leurs enfants qu’ils pensent à diminuer leur consommation de tabac, que souvent ils poursuivent avec mauvaise conscience, et parfois sans connaître les différentes aides existantes pour parvenir à arrêter de fumer.
Les seuls qui s’inquiètent de la diminution des fumeurs sont les cigarettiers. Ils ont bien compris que, dans nos pays, il serait difficile de lutter contre cette tendance et ils ont décidé de changer de stratégie: ils ont tous lancé sur le marché des cigarettes qui chauffent le tabac et ne le brûlent plus – IQOS pour Philip Morris International (PMI), GLO pour British American Tobacco (BAT) et PLOOM pour Japan Tobacco International (JTI), les trois plus grands producteurs de cigarettes aux côtés des Chinois. Ils axent leur marketing sur le côté jeune et branché en prétendant, comme PMI par exemple, ouvrir un espace high-tech de 700 m2 IQOS comprenant restaurant, café, espace de musique et de coworking; mais, derrière ces activités, le but réel est la promotion de IQOS chez les jeunes, dans «leur» quartier et en utilisant leurs codes culturels. Philip Morris prétend que son nouveau produit, selon des études faites dans son laboratoire, serait moins nocif puisque le tabac n’est que «chauffé». Or, une étude externe menée par une équipe de la Policlinique médicale universitaire (PMU) de Lausanne révèle des résultats inquiétants: contrairement à ce qu’affirme PMI, l’IQOS émettrait bel et bien de la fumée; il relâcherait aussi des composés toxiques présents également dans la fumée d’une cigarette conventionnelle1 value="1">Auer R, Concha-Lozano N, Jacot-Sadowski I, Cornuz J, Berthet A. «Heat-not-burn tobacco cigarettes: smoke by any other name.» JAMA Intern Med. doi:10.1001/jamainternmed.2017.1419.
Après s’être étonné publiquement de ces résultats, PMI, plutôt que d’encourager des études complémentaires pour mieux en comprendre l’implication pratique (qui serait la manière éthique d’en contester la validité), a choisi de faire pression sur le rectorat de l’université de Lausanne pour qu’il retire la publication2 value="2">J. Cachin, «Philip Morris attaque une étude», Le Courrier du 12.06.17. (ce qu’il n’a heureusement pas fait) et a menacé d’attaquer en justice les auteurs de l’article publié dans JAMA, prestigieuse revue médicale.
Une fois de plus, après avoir rajouté un filtre aux cigarettes dans les années 1950, inventé la cigarette light dans les années 1970, les cigarettiers cherchent à regagner des parts de marché et à augmenter les dividendes de leurs actionnaires, au mépris de la santé publique, et en trompant la population cible sur les risques sanitaires de leur produits.
IQOS, GLO sont déjà en vente en Suisse, alors que les cigarettes électroniques contenant de la nicotine (plus justement nommées vaporettes, car elles ne contiennent pas de tabac) ne peuvent être commercialisées, bien qu’elles soient un des outils utiles pour aider les fumeurs à arrêter de fumer et ainsi à préserver leur capital santé!
Demandez à nos autorités comment justifier pareille absurdité.
Notes